Nos 10 ans

10 ans déjà ! (Arthaud, 2000)

En 2000, pour les dix ans du festival, 25 écrivains célébraient Étonnants Voyageurs...

Editorial de Michel Le Bris

Dix ans... Pour nous tous, c’était hier à peine. Et pourtant, quelle aventure ! Avec cette fierté de pouvoir relire aujourd’hui l’éditorial de la première édition et de se dire que nous avons tenu le cap (…)

Texte d’Alain Bombard

Il est des lieux magiques où la pensée se concentre. Saint-Malo, tous les ans, joue ce rôle et nous invite au nom de Baudelaire. Michel Le Bris nous y reçoit sous le beau titre Etonnants Voyageurs. Et c’est Baudelaire qui nous accueille.
Pour tous les écrivains qui se pressent devant leurs lecteurs, c’est une joie de se rencontrer à nouveau, une fois l’an.


Texte de Nicolas Bouvier

La vie m’apparaît comme une aventure drolatique et pathétique qui se conclut par une disparition. En milieu bourgeois - celui de mon enfance - ces trois aspects sont volontiers biffés. Un homme vraiment drôle est plus craint qu’un extrémiste de droite ou de gauche même armé jusqu’aux dents.


Texte de Michel Chaillou

Dès que le navire est parti, dès qu’il a franchi le goulet du port, on est dans l’aventure. Pourtant, prenez les journaux de bord des navigateurs : il ne s’y passe rien ils sont truffés de détails anodins, presque puérils. C’est une tasse qui tombe, à telle heure, à cause d’un coup de tabac...


Texte de Daniel Chavarria

C’est en 1571 que sir Francis Drake vit pour la première fois un lamantin, ce mammifère qui hante les eaux antillaises. Et c’est un esclave marron de Cuba qui lui a appris à le traire et à fabriquer un fromage dont la râpure, diluée dans du rhum et de la salive de tabac mâché, formait une crème si miraculeuse qu’il suffisait d’en frictionner le crâne d’un chauve pour que celui-ci retrouve une abondante (...)

Texte de Francisco Coloane

Santiago, 18 janvier 1998 Je viens de recevoir une lettre de Michel Le Bris, directeur du festival Etonnants Voyageurs, qui m’informe que Saint-Malo s’apprête à célébrer le dixième anniversaire de ces rencontres culturelles et m’invite, pour la circonstance, à écrire quelques lignes. Avec grand plaisir. Je parlerai succinctement de ma qualité de cap-hornier, puisque j’en fus un, parmi tant de (...)

Texte de James Crumley

« Celui qui a déjà passé son temps à rouler sans but à travers les montagnes de l’Ouest connaît cette illusion de liberté, cette délicieuse liberté du cow-boy, du vagabond à cheval, du bandit armé, tous ces héros dégingandés des écrans de cinéma de notre enfance. Quelque part, tout près d’ici, de grands chevaux attendent d’être domptés, mais jamais soumis, des petits durs de la gâchette attendent d’être vaincus, (...)

Texte de Raphaël Confiant

Etonnants Voyageurs... Etonnantes rencontres J’ai longtemps rêvé de rencontrer Per-Jakez Hélias. Son Cheval d’orgueil m’avait embarqué pour d’insolites traversées des dunes et des forêts de la terre bretonne avec, comme en écho, cette langue menacée dans sa chair même tout comme la mienne, le créole. D’avoir d’abord rédigé son chef-d’œuvre en breton m’émouvait, moi qui m’efforçais depuis une décennie (...)

Texte de Didier Daeninckx

Saint-Malotru La première fois que nous sommes venus au festival, nous avions manqué le train des invités. Un convoi ordinaire nous avait largués à la gare et il avait fallu marcher en rectiligne, jusqu’au port. Je m’étais arrêté devant les murailles de bois coupé destinées aux entrailles des cargos. Des mouettes, des albatros criaient au-dessus de nos têtes. Je m’apprêtais à me remettre en marche vers (...)

Texte de Jean-François Deniau

Est-ce qu’il existe des voyages qui ne soient pas étonnants et des voyageurs qui ne soient pas étonnés ? Je connais un peu mieux la mer que la terre. Rien n’est plus changeant que 360° d’horizon. Rien de plus surprenant que les courants, les vagues, le vent, la lumière, la nuit qui vient, le jour qui tarde à venir. Rien n’est plus terrifiant que le très gros temps où le monstre des profondeurs en (...)

Texte de Michel Déon

Tantôt par d’agréables hasards, tantôt par une volonté que dictait l’impérieux désir de voir de mes yeux ce que j’avais lu dans mes chers auteurs, j’ai en fin de compte plus vécu à l’étranger qu’en France. L’Europe a été mon domaine avant que des économistes en aient une idée qui reste bien abstraite. Ces séjours à l’étranger ont nourri mes livres, les nourrissent encore, mais si je remonte un peu loin, même (...)

Texte d’Alain Dugrand

Au-delà du fleuve et sous les arbres, Ivy Jardin tient table ouverte à l’auberge Robinson. Ridée comme une pomme, la dame d’Édimbourg déjeune au whisky et croque les bigorneaux avec leurs coquilles ! A huit générations près, Ivy est la descendante d’Alexandre Selkirk, le marin perdu qui inspira Daniel Defoe. L’Écossaise est partie pour l’Ile aux Trésors en compagnie de son grand fils. Afin de déposer une (...)

José Manuel Fajardo

Nuit de salsa Nous avions passé toute la journée à parler de Stevenson. Daniel Mordzinski cherchait à faire des portraits insolites des écrivains qui assistaient au festival. Jorge Amado, il l’avait photographié dans un train. Il avait fait monter Michel Le Bris à bord d’un bateau qui n’était pas le sien, mais, les mains sur la barre, Le Bris avait tout du vieux loup de mer. Eduardo Lourenço, s’était (...)

Texte de Jim Harrison

Saint-Malo Je me suis dit, hier après-midi à 15h47, que cela faisait huit ans que je n’avais pas pris de vacances pour moi tout seul, de ces vacances où la famille n’a aucune part, où il n’est pas question de recevoir des amis, où je ne m’efforce pas d’être bien sage au cours de ce bref et brutal passage qu’on appelle la vie. Comme mon père avant moi, je suis d’un naturel passablement larmoyant et (...)

Souvenirs de Jean-Claude Izzo : "Saint-Malo. C’est ici que j’ai appris à écrire des romans"

Saint-Malo. C’est ici que j’ai appris à écrire des romans. Plus précisément, c’est ici, au contact d’écrivains que je découvrais, que je rencontrais pour la première fois - Nicolas Bouvier, Alvaro Mutis, Luís Sepúlveda, James Crumley, Francisco Coloane, James Welch - qu’est né ce désir de raconter le monde à mon tour.


Texte de Jacques Lacarrière

Se peut-il qu’aujourd’hui, alors que des centaines de satellites sillonnent notre ciel et nous transmettent en un instant des images de l’autre bout du monde, se peut-il que les voyages, certains voyages tout au moins et certains voyageurs, aient encore le pouvoir et le don de nous étonner ? Et en quoi seraient-ils ou sont-ils étonnants ? Si d’aventure vous souhaitez découvrir les amours des (...)

Texte de Gilles Lapouge

Henri Michaux descend l’Amazone en 1930. De ce périple, il ramène un chef-d’œuvre, Ecuador, et la conviction que "la terre est rincée de son exotisme". On se dit : ce Michaux exagère. Le monde est loin d’avoir ouvert tous ses tabernacles. Il est plein d’énigmes et d’ombres. Il recèle des forêts, des steppes et des glaciers infinis. L’exotisme a de belles nuits devant lui. Michaux pourtant ne s’était pas (...)

Texte de Jean Malaurie

Hommage à Michel Le Bris Le plus grand mérite pour moi du festival de Saint-Malo, et de sa figure de proue, Michel Le Bris, est d’avoir non seulement rendu son honneur à l’idée de voyage, détournée de nos jours par la vague croissante du tourisme, mais aussi sa dignité perdue à la grande cité corsaire, qui s’était peu à peu réduite à n’être plus qu’une station vacancière et crêpière. Et ce, malgré Le (...)

Texte d’Ed Mc Bain

Je me rappelle une plage froide, mais ensoleillée, où les gens se promenaient en longs pardessus, les enfants courant après les vagues. Je me rappelle un brin de muguet sur le plateau de mon petit déjeuner, le 1er mai, avec un petit mot disant : Je porte bonheur. Je me rappelle des petits restaurants embrumés par la fumée de cigarettes. Je me rappelle le concierge de l’hôtel me tendant un billet de (...)

Texte de Jacques Meunier

L’avait fait le tour d’Australie à dos de pédalo traversé le désert de Gobi en tondeuse à gazon l’avait rien gagné à ces petits jeux-là (pas même trois lignes dans le Guiness des records) l’en prit son parti (l’était pas de ces gens-là qui mettent des fixe-chausettes au revers du veston) l’acheta une villa du côté de Saint-Malo puis illico s’attaqua à une sienne obsession lire trois mille Que sais-je ? (...)

Souvenirs de Théodore Monod : "Nombre de découvertes sont en réalité dues au hasard…"

Chaque voyage a donc un objectif, défini à l’avance mais il faut reconnaître qu’en fait nombre de découvertes dont certaines ont été importantes sont dues en réalité au hasard.


Texte d’Alvaro Mutis

Rendez-vous dans l’Atlantique Sud J’ai pensé que l’une des formes les plus justes et les plus opportunes pour répondre à votre question serait de rendre hommage au plus étonnant des voyageurs des temps modernes : Joseph Conrad. En nous rappelant le moment où il décida de devenir le plus étonnant des romanciers. Dans la petite mais confortable cabine de second à bord du Torrens, un svelte trois-mâts (...)

Texte d’Erik Orsenna

Comme tous les écrivains, je suis jaloux des bateaux : s’il s’agit de partir que peuvent mes livres face à une belle coque de race ? S’il s’agit d’écrire, quelle tristesse le papier comparé à une voile pleine de ris ? Et s’il s’agit de gloire et de permanence, quelle meilleure leçon d’éphémère que celle du sillage, moqué, d’ailleurs, par les mouettes ? Or pourtant, depuis dix ans, je vois quelques grimaces à (...)

Texte de Jonathan Raban

La littérature de voyage est une forme ouverte. Elle n’a pas de règles, pas de conventions inviolables. Elle abrite toute une variété de personnages étranges et mal assortis ; journalistes à la poursuite d’un sujet, aventuriers hirsutes, romanciers de contrebande, anthropologues, écrivains naturalistes, cascadeurs résolus à tenter la traversée de l’Atlantique en baignoire ou le tour du monde en cinq (...)