HADJIMARKOS CLARKE Phoebe

France - États-Unis

Aliène (Éditions du Sous-Sol, 2024)

© Bénédicte Roscot

Traductrice franco-américaine de profession, Phœbe Hadjimarkos Clarke avait fait une rentrée remarquée dans la littérature de la science-fiction queer avec Tabor (Le Sabot, 2021). Tenant le cap d’une littérature de l’étrangeté, son deuxième livre publié cette année raconte la confrontation déroutante entre une chienne mutante et une femme déphasée dans un décor rural menaçant. Aliène (Éditions du Sous-Sol, 2024) est un puissant roman d’anticipation sociale qui, mêlant le mythologique et le fantastique à des enjeux ultra-contemporains, aborde sous un angle original les rapports de domination et d’aliénation de notre monde.


Bibliographie

  • Aliène (Éditions du Sous-Sol, 2024)
  • 18 Brum’Hair (Rotolux Press, 2023)
  • Tabor (Le Sabot, 2021)
Aliène

Aliène

Éditions du Sous-Sol - 2024

Fauvel a perdu un œil suite à un tir de LBD. Elle accepte de garder la chienne du père d’une de ses amies dans une maison isolée à la campagne. Hannah n’est pas un chien comme les autres, c’est le clone d’une première Hannah, qui trône empaillée au milieu du salon. Elle suscite les peurs et les reproches muets du village, à mesure qu’on découvre au matin des animaux massacrés, et qu’elle-même rentre parfois ensanglantée.

Cette situation est le point de départ d’un récit de traque et de cauchemar délicatement progressif, la plupart du temps fantomatique. Jamais l’assaillant n’est clairement nommé, jamais la cible n’est clairement identifiée. Fauvel sait être une proie, mais de qui ? Dans le village, un groupe de chasseurs, tous ouvriers ou anciens ouvriers de l’usine d’eau minérale, peu loquaces et mal lotis par la vie, font naître les fantasmes, tantôt sexuels, tantôt horrifiques. Et plus particulièrement chez Fauvel, coupée du monde par sa conscience éparpillée, et chez Mitch, un jeune sociologue qui enquête sur les récits d’enlèvements par les extraterrestres, nombreux dans la région, surtout chez les anciens ouvriers de l’usine.

Au fil d’une pseudo-enquête hallucinée, le roman explore les notions de domination, d’animalité et de violence. À travers la proximité, voire l’amalgame entre animaux et humains, Aliène questionne la nature de ce qui est caché, la vie animale, et surtout l’instinct de peur. Tel est le véritable fil du récit, rarement traité avec autant de nuance et de force.


  • « En réponse à la peur et à la violence, l’autrice offre des réflexions d’une grande justesse sur l’amitié, la solidarité et l’impitoyabilité du monde du travail. Et elle explore surtout une relation horizontale, libérée – enfin – de toute domination. La rencontre de deux colères, celle d’une chienne mutante et d’une femme mutilée. Ce qui se joue là n’est rien d’autre que la possibilité de la fin de la domination de l’humain sur l’animal. “À cet instant, écrit Phœbe Hadjimarkos Clarke, c’est ce que [Fauvel] a connu de mieux dans la vie, cet amour inattendu de la part d’une chienne cruelle.” Une drôle de lumière qui brille fort au cœur de ce roman qui est, du reste, d’une noirceur redoutable. » Les Inrocks
  • « Dans sa conscience cotonneuse, Fauvel tisse des liens qui peuvent sembler entendus (le patriarcat, le machisme, la chasse, le salariat, la répression pendant les manifestations : « La même logique qui l’a écrasée »), mais qui prennent, sous la plume de Phœbe Hadjimarkos Clarke, une forme sidérante : on n’y compte plus, passé un certain stade, les épiphanies et les hallucinations. Aucune visée sensationnaliste ici – notre époque se drape de tant de bizarreries dans ce roman, car c’est elle, la bête curieuse, l’aliène. » Le Monde
  • « Aliène, sombre et fascinant, aspire dans un univers embrumé, entre réalité et rêve, entre sang et sexualité, au tempo des visions hallucinées de Fauvel, de sa souffrance et de sa sève interne qui recommence à vibrer. La proie d’autrefois se mue en prédatrice, soutenue par l’amitié, l’empathie avec la nature environnante et l’animalité, sans gnangnan. Sacrée traversée. » Libération
  • « Un mauvais trip qui vous retourne le ventre et maltraite votre esprit. Pour un résultat très réussi. » Ouest-France
  • « Le deuxième roman de Phœbe Hadjimarkos Clarke est une fable campagnarde hantée de chasseurs tourmentés par des extraterrestres à la fiction sociale, le tout mâtiné d’horreur surnaturelle. » Médiapart