Six générations, cent ans d’histoire. La huitième vie de Nino Haratischwili, auteure géorgienne de langue allemande, nous plonge dans une véritable odyssée qui mêle l’histoire de l’Europe et celle d’une famille dont les migrations font écho aux changements géopolitiques du vingtième siècle.
Nino Haratischwili est l’enfant d’une Europe morcellée, sous domination soviétique, scindée en deux par le rideau de fer, une Europe en guerre. Voilà ce qui fait le terreau de ses romans. Originaire de Tbilissi (Géorgie), elle part pour l’Allemagne en 2003, à 20 ans, pour étudier le théâtre. Elle a déjà signé plus de 18 pièces en tant que dramaturge et metteuse en scène et réside aujourd’hui à Hambourg.
En tant que romancière, elle acquiert une place d’importance dans la « Migrationsliteratur » (littérature de migration), courant littéraire germanophone composé d’écrivains issus de l’immigration qui font le choix d’écrire en allemand plutôt que dans leur idiome maternel pour évoquer des problématiques interculturelles. Elle aussi adopte l’allemand dans l’écriture, un exercice de style qui lui réussit : son premier roman, Juja (non traduit en français), reçoit le Prix du premier roman du Buddenbrookhaus Lübeck en 2011. Mon doux jumeau, son deuxième roman, a été récompensé la même année par le Prix des éditeurs indépendants. Publié en français chez Buchet Chastel en 2015, il retrace l’histoire d’un amour impossible et explore la passion autodestructrice qui réside en chacun de nous. Au récit d’une histoire familiale tragique s’ajoute celui d’une Géorgie à peine sortie de l’oppression soviétique. Un roman d’amour et de guerre qui prend des airs de tragédie classique.
En 2017 paraît chez Piranha La huitième vie qui mélange avec brio le personnel et l’universel en racontant l’histoire d’individus dont les vies sont influencées par les événements qui ont secoué l’Est de l’Europe au XXe siècle : la révolution d’octobre, le soviétisme, le national-socialisme, la partition allemande... Un roman-fleuve plein d’émotion que Nino Haratischwili achève en 2014 après plus de 4 ans de recherches en Géorgie, en Russie et en Ukraine. L’histoire de cette famille fait ainsi écho à toute l’histoire d’un continent : la famille symbolise à la fois l’origine et le destin. La huitième vie est une saga dont l’élan est double, entre recherche de repères et création d’identité. Ce roman d’apprentissage acquiert un caractère universel en contant des récits qui nous touchent et nous interpellent tous.
« À travers l’écriture, j’ai voulu montrer que les événements historiques ne sont pas isolés, ils sont toujours la conséquence de ce qui s’est passé avant. Cette corrélation constitue la structure de mon roman. Tous les personnages sont ancrés dans l’Histoire et sont liés les uns aux autres » confie l’auteure.
Bibliographie
- La huitième vie (2017, Piranha)
- Mon doux jumeau (2015, Buchet Chastel)
- Juja, non traduit (2010, Verbrecher Verlag)