ILLUSTRATIONS

Dire le monde, en bandes dessinées, peintures, dessins…

4 mai 2012.
 

Palais du Grand Large, salle Vauban

En 1992, l’attribution du Pulitzer à Maus, le monument graphique d’Art Spiegelman sur la Shoah, consacrait la capacité de la BD à rendre compte de la violence du monde. Aujourd’hui, ils sont de plus en plus nombreux à partir, le carnet de croquis à la main, se frotter au réel : la BD, définitivement, est sortie de sa bulle.

Rwanda, Cambodge, Russie, Tunisie, Iran… 5 mondes, 5 albums aux univers graphiques différents unis par le souci de témoigner, de retranscrire au plus juste l’expérience vécue. Avec une subjectivité assumée, leurs auteurs interrogent les heures noires de l’Histoire comme l’actualité la plus brûlante. Ecrit à la première personne ou s’effaçant devant la parole des témoins, tous se confrontent à la question de la représentation de la violence.

Avec Turquoise, Frédéric Debomy et Olivier Bramanti, signent un bouleversant carnet sur le génocide rwandais. Entre la beauté calme des milles collines du Rwanda, et les mots crus d’une jeune rescapée des massacres, le contraste est brutal. La violence, extrême, rôde hors du champ de l’image, cruelle, menaçante.

Né 3 jours après la prise de Phnom Penh par les communistes cambodgiens, Tian met en images les souvenirs de ses proches dans L’année du lièvre, un récit sensible, à hauteur d’homme, de la vie sous le régime sanglant des Khmers rouges.

Des crimes de masse, il s’en commet aussi aux marges de l’Europe : parti sur les traces de la journaliste russe Anna Politkoskaïa, assassinée en octobre 2006, Igort s’est rendu en Tchétchénie où se déroule l’une des guerres les plus violentes et les moins médiatisées de l’histoire. Ses Cahiers Russes, vibrants de colère, sobres dans l’évocation du pire, se penchent avec beaucoup de sensibilité sur le grand corps malade de la Russie post-soviétique.

Prisonnier de longs mois du système carcéral kafkaïen mis en place par le régime iranien, le dessinateur Mana Neyestani, aujourd’hui réfugié en France, livre avec Une métamorphose iranienne un témoignage graphique original et bouleversant sur son calvaire.

Enfin, s’inspirant de personnages réels, de vidéos postées sur le net par des Tunisiens anonymes et d’articles de presse, Éric Borg, condense les faits qui menèrent en 2011 à la chute du clan Ben Ali dans une fiction au rythme enlevé, servi par le trait incisif et réaliste d’Alex Talamba.