MBEMBE Achille

Cameroun

4 avril 2023.

Politologue camerounais, professeur d’histoire et de sciences politiques à l’Université du Witwatersrand à Johannesburg et à Duke University aux Etats-Unis, Achille Mbembe est aujourd’hui l’un des plus grands théoriciens du post-colonialisme. Critique sans renoncer à l’optimisme, il analyse l’Afrique contemporaine et ses rapports avec les sociétés post-coloniales européennes, notamment la France, qui, selon lui, « décolonisa sans s’autodécoloniser ». Conclusion d’une trilogie débutée avec Politique de l’inimitié (La Découverte, 2016) et Brutalisme (La Découverte, 2020), il défend dans La communauté terrestre l’interdépendance de la démocratie et de la protection du vivant, puisant dans les contes et cultures traditionnelles africaines afin de retisser le lien entre l’homme et son environnement.

 

Après une thèse de doctorat commencée à Paris sur le mouvement nationaliste camerounais, il part en 1986 aux États-Unis pour enseigner dans différentes universités et publie Afriques Indociles. Christianisme, pouvoir et État en société postcoloniale. Établi au Cap, il publie en 2000 De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine.

Alors que s’achevait la célébration du cinquantenaire des indépendances africaines, Achille Mbembe a publié en octobre 2010 Sortir de la grande nuit : Essai sur l’Afrique décolonisée. Cet ouvrage qui allie un style tantôt sobre, tantôt poétique analyse certes les mutations, les heurts et les crises de tout un continent depuis les indépendances, mais pose sur ces mouvements un regard optimiste qui laisse entrevoir une voie possible pour l’Afrique aujourd’hui.

Participant à l’ouvrage évènement "La France noire", publié cette année sous la direction de Pascal Blanchard, Achille Mbembe a également préfacé en 2011 les “Œuvres” complètes de Frantz Fanon, rééditées à l’occasion des cinquante ans de la mort du psychiatre martiniquais. Une "pensée métallique" a laquelle il affirme devoir "l’idée qu’il y a dans toute personne humaine quelque chose d’indomptable, de foncièrement inapprivoisable, que la domination – peu en importent les formes – ne peut ni éliminer, ni contenir, ni réprimer totalement."

Parler de brutalisme pour parler d’un monde déshumanisé : c’est l’étonnant parallèle que fait l’auteur dans un nouvel essai finement documenté, Brutalisme (La Découverte, 2020) dans lequel l’auteur compare les matériaux bruts utilisés dans le style architectural du même nom, et les corps utilisés par les politiques néolibérales. Dans la lignée de Critique de la raison nègre (La Découverte, 2013) et Politiques de l’inimitié (La Découverte, 2016), il y dénonce les dangers du libéralisme économique qui "transforme l’humanité en matière et énergie" dans notre société, via le progrès technologique.


Bibliographie

 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

La communauté terrestre

La Découverte - 2023

« La démocratie et le vivant constituent aujourd’hui les deux points d’entrée principaux pour ceux et celles qui désirent construire un monde habitable par tous et respirable pour tous. il est possible – du moins, je le pense – de réinventer la démocratie à partir de l’idée du vivant en tant qu’indétermination constitutive, capacité de métamorphose, de prolifération, d’ouverture radicale sur la multiplicité. »

Après Critique de la raison nègre (2013), Politiques de l’inimitié (2016) et Brutalisme (2020), Achille Mbembe, figure incontournable de la pensée postcoloniale et acteur majeur du paysage intellectuel mondial, poursuit ses réflexions approfondies sur notre monde contemporain en remettant au centre les pensées africaines, réservoir de la compréhension du monde.

Parler de la Terre, c’est en réalité avoir à l’esprit une chaîne symbiotique, l’étendue du vivant et ses innombrables manifestations. Les humains, les espèces animales, végétales et minérales, les microbes, bactéries et virus, ainsi que les dispositifs technologiques et autres appareillages artificiels en font inséparablement partie.
Tel est aussi le cas, du moins dans les pensées animistes africaines, de toutes les forces invisibles, des génies, des esprits et des masques. Prenant fermement appui sur l’insondable richesse de ces pensées, Achille Mbembe propose dans cet essai une puissante réflexion sur la Terre, ses devenirs, et surtout la sorte de communauté qu’elle forme avec la cohorte des espèces animées et inanimées qui l’habitent, y ont trouvé refuge ou y séjournent. Il montre comment notre relation fondamentale à la Terre ne peut être que celle de l’habitant et du passant. C’est en tant qu’habitant et passant qu’elle nous accueille et nous abrite, qu’elle entretient les traces de notre passage, celles qui parlent en notre nom et en mémoire de qui nous aurons été avec d’autres, au milieu d’eux. C’est à ce titre qu’elle est la toute dernière des utopies, la pierre d’angle d’une nouvelle conscience planétaire.