Etonnants voyageurs à Mopti : Quand le livre séduit !

16 novembre 2010.
 

En prélude à la 8ème édition d’étonnants voyageurs que notre capitale a abrité du 22 au 28 novembre dernier, une caravane a sillonné plusieurs localités de l’intérieur du pays. L’étape de Mopti a vu la participation de deux écrivains et d’un slameur. Ils ont mis leur séjour à profit pour animer des ateliers d’écriture et des conférences autour de leurs œuvres des scolaires.
Du dimanche 21 au mercredi 24 novembre dernier, Mopti a accueilli la caravane du festival d’étonnants voyageurs. Il s’agit des hommes de culture et de lettres dont l’écrivain malien, Sirafily Diango, à travers son romain ’’Tiara l’immondice’’. De l’écrivain gabonais, Janus Otsiemi, auteur de plusieurs ouvrages dont le dernier intitulé ’’la bouche qui mange ne parle pas ’’. Et enfin, le slameur d’origine camerounaise, Kalire, membre de l’association des slameurs du Mali (Slama). Ils ont mis à profit leurs séjours à Mopti pour présenter leurs œuvres au monde scolaire et littéraire de la ville. Les activités ont eu pour cadre, l’alliance franco-malien de Mopti, le lycée privé moderne de Mopti, l’institut de formation des maîtres de Sevaré et l’école privée fondamentale Samassekou. Comme de coutume, les caravaniers ont rendu visite au gouverneur de la région, avant de se rendre à l’alliance franco-malienne où le slameur, kalire, a animé un atelier d’écriture de slam qui a regroupé une quinzaine d’élèves des écoles de la localité.’’Il faut claquer qu’on puisse t’entendre, il faut qu’il ait un impact dans votre message’’, explique t-il aux apprenants. Avant de préciser que le slam est né aux Etats-Unis dans les années 80. Il a aussi déclamé quelques titres de slam de son dernier répertoire. Cet atelier s’est déroulé pendant deux jours d’affilé. Il a été ponctué de nombreux exercices pratiques. De leur coté les deux écrivains maliens et gabonais, Sirafily Diango et Janus Otsiemi ont tour à tour présenté leurs œuvres aux lycéens et aux futurs maîtres. Sirafily Diango, l’auteur du roman’’ Tiara l’immondice’’ a fait remarquer qu’il lui a fallu 15 ans pour écrire ce livre. Avant de souligner qu’il tire son inspiration d’un fait divers, c’est la fiction pure et simple. Le moment émouvant, c’est quand l’auteur récite un extrait du roman intitulé ’’Kia’’. Et, Janus Otsiemi qui s’est illustré dans un roman du genre polar s’est entretenu avec les élèves sur le bien fondé de son œuvre intitulé ’’ la bouchee qui mange ne parle pas’’. Et a M.Otsiemi de souligner que ’’Ceux qui se remplissent les poches ne parlent pas’’. Il s’agit des hommes politiques qui sont souvent cités dans la corruption. Dans ces deux établissements, le lycée moderne de Mopti et l’Ifm, les échanges ont été enrichissants pour les auteurs mais aussi les élèves futurs maîtres et le corps professoral.

Café littéraire interactive
Le café littéraire que les caravaniers ont animé a ’été en enrichissant à plus d’un titre. Là, il a été surtout question des réalités quotidiennes du monde des lettres en Afrique. C’est le slameur, Kalire, qui a donné le ton avec son slam à la manière juvénile.
Ici, il évoque l’espoir d’un peuple surtout jeune du et brisé par les promesses non tenues d’un président. Déception qui a conduit à la désillusion de cette couche. S’agissant de l’histoire, de sa propre histoire vécue dans son Cameroun natal, oui peut-on tenter de dire. Il parle aussi de liberté qu’il clame à travers la rythmique de feu Ali Farka Touré. Kalire avait de l’espoir car il voulait au son des mots renverser la situation qui devient de plus en plus difficile dans plusieurs pays d’Afrique. Il se veut à cet effet les portes drapeaux de tous ces jeunes qui manquent de liberté.

Sirafily Diango :
’’ Tiara l’immondice ’’, c’est le titre de la dernière œuvre de cet auteur malien. Dans cet ouvrage qui lui a valu un prix au niveau international, il narre une aventure qu’il considère comme un choc de cultures. Il s’agit d’une œuvre émouvante dans laquelle il évoque le destin presque tourmenté et croisé de plusieurs femmes. Un récit de l’auteur qui renvoi les lecteurs au métissage. De ce métissage, il en fait un perpétuel combat et plaidoyer.
Il y croit dur comme fer. ’’ Je prône le métissage et je pense que l’avenir du monde en dépend’’, a-t-il lancé. ’’ Il faut écrire dans une langue adoptive, la difficulté est grande pour écrire dans la langue française et il faut l’avouer on la torture’’, a-t-il précisé. ’’L’écriture c’est d’abord la conviction parce qu’on y trouve de la souffrance’’, a souligné l’auteur. Pour écrire son premier livre, il lui a fallu 15 ans de labeur, de rejet.

Janus : ’’La bouche qui mange ne parle pas’’
Janus part de sa propre expérience et de son vécu quotidien, celui d’un enfant né dans la banlieue de Libreville où les pratiques comme les crimes rituels font légions en période électorale. Un roman policier version polar, c’est ce dont il en fait cas dans cet ouvrage de référence. L’impunité, la corruption entre autres ont eu raison de la misère d’un peuple médusé. Pour Janus, le choix de la langue s’explique par le fait que la langue française est celle apprise à l’école. Selon lui, la seule façon de sauver les langues nationales, c’est de valoriser certains mots dans la grammaire française. ’’Il ne s’agit pas pour nous écrivains d’écrire nos romains comme les occidentaux. C’est le vent de la démocratie des années 90 qui a sonné le glas du romain policier africain.
C’est une manière de rompre avec les vielles habitudes qui constituent à raconter les vécues du passé. On voulait que les enfants partent à l’école à pieds alors qu’on oublie que les mentalités ont changé. Le constat qui se dégage, selon Janus, les livres ne sont pas à la portée des Africains et qu’il y a un problème de pouvoir d’achat... Le manque d’industrie du livre qui valorise les créations. Les autorités font de cette pauvreté un fond de commerce et ça marche très bien’’, fera t-il remarqué. Kalire qui a été interpellé au sujet du slam a donné des explications on ne plus claires..’’ J’écris mes textes ça me prends beaucoup de temps pour le faire.
Je suis révolutionnaire dans mes textes et je n’ai pas peur des représailles. Quand je vois quelques chose qui me tique je le dis’’ a-t-il lancé.’’ Il y a une grande différence entre le rap et le slam. Le slam c’est de la poésie révolutionnaire’’, soutient-il.’ ’Le français c’est la langue que mes parents m’ont appris en fait c’est la langue de travail pour moi’’, souligne t-il. En deux heures d’horloge, ce café littéraire a été apprécié à sa juste valeur au grand bonheur des amoureux des lettres de la Venise malienne. Au cours des débats qui ont suivi les explications des auteurs, le moins qu’on puisse constater, c’est que le public était comblé.


Les auteurs qui se sont rendus à Mopti du lundi 22 au mercredi 24 étaient : Janis Otsiemi, Sirafily Diango, un slameur d’Aslama.

AU PROGRAMME :

- Lundi 22 novembre

9h : Visite de courtoisie aux autorités.

10h : Ouverture de l’atelier de slam.

10h30 : Conférence

16h30-18h : causerie- débat autour des œuvres des écrivains

- Mardi 23 novembre

09h-12h : Atelier slam

16h-18h : visite de sites touristiques

- Mercredi 24 novembre : retour des auteurs