DIARRA Ousmane

Mali

8 mars 2015.
 
© C. Hélie

Ousmane Diarra, bibliothécaire à l’Institut français du Mali, est un romancier, un conteur et un opposant politique à la prose acérée.
Ses romans sont traversés par les conflits qui touchent le Mali, en proie aux puissances politiques, religieuses et occultes qui hantent et pillent ses villes et ses villages.

Né en 1960, diplômé de l’Ecole Normale Supérieure de Bamako d’une maîtrise de Lettres Modernes, il a enseigné le français pendant deux ans.
En 2006, son premier roman Vieux lézard remporte trois prix : Le Prix Amadou Kourouma de Genève, le Prix RFO et le Prix du Prince Pierre de Monaco. Vieux lézard
 est à la fois un roman d’amour et de société, où l’auteur mélange récit imaginaire, autobiographie et vérités intemporelles, à la manière des griots, narrateurs de légendes. Pagnes de femme, en 2008, est inspiré d’une vieille chanson bambara de la moitié du XIXème siècle. Toujours dans le style réinventé des griots, Ousmane Diarra nous donne à lire non seulement le roman d’un continent et de ses conflits, mais également à entendre le tumulte d’un monde moderne et bouleversé. Il a aussi écrit de nombreuses nouvelles et récits illustrés dont un recueil collectif de nouvelles en co-écriture avec Moussa Konaté, Yambo Ouloguème, Mandé Alpha Diarra et Sirafily Diango, puis un autre intitulé Les moutons du monde.
 Ousmane Diarra est également auteur de livres pour la jeunesse et conteur. À ce titre il a participé à de nombreuses animations autour du conte au Mali et en France.

En 2013, le Mali est à feu et à sang. Face à ce que l’actualité nomme la « crise malienne », l’auteur interrompt tous ses travaux pour écrire son nouveau roman La route des clameurs faisant retentir une colère irrépressible. Il dépeint l’horreur qui s’abat sur son pays à travers le regard d’un enfant enrôlé malgré lui dans le Jihad. Son père est un artiste peintre qui refuse de capituler, avec pour seules armes un pinceau et l’ironie du désespoir.
C’est une ode à la résistance et à la paix contre le fanatisme et l’obscurantisme que nous offre ici Ousmane Diarra, questionnant l’instrumentalisation de l’Islam dans un contexte « postcolonial ».

Lire l’article d’Oussmane Diarra sur le site d’Etonnants-Voyageurs.


Bibliographie

Contes pour enfants :

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

La route des clameurs

Gallimard - 2014

« Un matin, mon papa a fait apparaître un grand tableau vierge qu’il avait soigneusement caché dans la maison. Il connaît sa maison plus que quiconque au monde, mon papa. Il a donc sorti son tableau avec des pinceaux et des boîtes de peinture. Il s’est installé dans la rue, devant notre maison. Il s’est mis à crayonner, à peindre. Il avait presque les yeux fermés. Les gens qui passaient s’arrêtaient pour le regarder comme on regarde un animal sauvage au zoo, qui tourne en rond dans sa cage en fer, qui rugit en vain sa colère. Même moi qui suis son fils, je ne comprends rien à ce qu’il était en train de dessiner. Il a travaillé toute une journée ainsi. C’est à la nuit tombante que j’ai vu enfin surgir de ses pinceaux un vieux cochon... »
On est au Mali, dans un sanglant bouillon d’intolérance, sous la férule des islamistes conduits par le calife Mabu Maba dit Fieffé Ranson Kattar Ibn Ahmad Almorbidonne, et aux prises avec la férocité des gamins imams. Un artiste peintre, par ailleurs ancien condisciple du faux calife, est pris dans les nasses de l’obscurantisme. On détruit sa famille, on détruit son atelier, ses tableaux et ses sculptures partent en fumée. Seule lui reste encore sa tête pleine d’ironie pour tenir tête aux envahisseurs, inoubliable figure de notre époque plombée de fanatismes, père à la fierté frêle et ulcérée, artiste à l’humour ravageur, homme à la dignité désemparée et exemplaire... C’est un enfant qui raconte.