JORDIS Christine

France

4 avril 2023.

Écrivaine, journaliste au Monde, membre du comité de lecture chez Grasset et spécialiste des lettres anglaises, elle sait nous entraîner avec le même talent dans le monde littéraire anglais ou dans un Orient rêvé. D’un même pas, son œuvre parcourt les paysages et les livres, traverse les terres bouddhistes de Birmanie, les poèmes de Coleridge, les étendues sauvages du Yorkshire… Dans son dernier livre, Christine Jordis brosse le tableau virtuose d’un Japon médiéval à travers le portrait frondeur du moine et poète bouddhiste Ikkyu. Christine Jordis est également membre du jury du Prix Nicolas Bouvier depuis 2014.

 

Née en Algérie, elle a étudié la littérature anglaise à la Sorbonne et à Harvard. Auteur d’une thèse de doctorat sur l’humour noir anglais, elle a été nommée à son retour en France responsable des rencontres littéraires du British Council. Après avoir dirigé le domaine anglo-saxon chez Gallimard, elle collabore aujourd’hui au Monde des Livres et est membre du Prix Femina.

Ses romans et essais, Une passion excentrique : Visites anglaises, Gens de la Tamise : Le roman anglais au XXe siècle, Le paysage et l’amour dans le roman anglais, font découvrir au lecteur les aspects multiples, changeants et éternels de l’Angleterre à travers le regard des peintres, écrivains, poètes et philosophes qui ont habité l’île.

Très attirée par l’Asie, où elle a fréquemment voyagé, elle a également publié Bali, Java, en rêvant, Promenades en terre bouddhiste de Birmanie et s’est intéressée à l’histoire de Gandhi (Gandhi, Gallimard, 2006).

En 2009, elle publie un bel essai, L’aventure du désert, qui prend la forme d’une double biographie méditative, centrée sur les figures de T.E. Lawrence, le soldat-héros et Charles de Foucauld, le saint. Deux prédateurs d’infini tentés par l’Orient et ses déserts, deux destins différents liés par ce même besoin « d’éprouver la mort en continuant de vivre », besoin d’excès, d’extrême, de vie incandescente.

Trois ans plus tard, Christine Jordis brosse dans Une vie pour l’impossible le portrait de son père, l’aventurier Henri de Foucaucourt, dont le credo était de « vivre à la hauteur de son exigence ». Aventurier en Syrie, combattant en Italie, ermite parmi les Inuits, retiré dans une vie monacale au Sénégal : en s’appuyant sur ses lettres et ses archives personnelles, l’auteur retrace les mille vies de cet homme au destin extraordinaire.

Elle publie ensuite, en 2014, la biographie d’un autre personnage historique hors du commun : le poète et peintre anglais William Blake. Auteur de longs poèmes prophétiques, visionnaire au style halluciné, considéré comme fou par ses contemporains aux XVIIIe et XIXe siècles, il opposait au matérialisme naissant et à l’argent-roi la poésie et l’art, seules véritables sources de bonheur pour l’homme. Ses prises de position - anticléricales, antimonarchistes - lui valurent de mener une vie dans l’ombre, dans la pauvreté et la solitude. Selon Christine Jordis, l’auteur du Mariage du Ciel et de L’enfer a « tellement bien compris son temps qu’il a compris le nôtre ».

Après un récit en forme d’enquête historique, Paysage d’hiver - Voyage en compagnie d’un sage (Albin Michel, 2016) sur le grand calligraphe coréen Chusa, ministre du roi, inspecteur royal, penseur et artiste, qui subit l’exil et la privation à la fin de sa vie, Christine Jordis revient en 2017 avec un de ses ouvrages les plus personnels : Automnes : Plus je vieillis, plus je me sens prête à vivre. De nos jours, la vieillesse ressemble à une malédiction ! La pire chose qui puisse nous arriver dans notre société, et à laquelle nul ne peut échapper … Christine Jordis nous invite ici à changer notre regard, à ne plus voir la vieillesse comme une course après la jeunesse qui s’enfuit, mais comme l’apprentissage d’une nouvelle aventure et la poursuite d’un voyage intérieur. En lisant, en rêvant, en apprenant – dans la compagnie des sages. Un essai poétique, qui se veut néanmoins combattif, pour apprendre à goûter aux joies de l’âge et à lâcher prise.

Tu n’as pas de cœur nous immerge dans la complexité des rapports familiaux. Le récit se concentre sur trois femmes (une grand-mère, sa fille et sa petite-fille) issues d’un milieu bourgeois. En menant une réflexion âpre sur les relations intergénérationnelles qui unissent ces trois personnages, Christine Jordis s’interroge finalement sur la difficulté de se construire, de se faire une place, dans une famille marquée par la souffrance. Frustrations, non-dits, exutoires, colère, haine et amour inconditionnel se mêlent pour laisser place à un véritable « champ de bataille » familial. Mais s’il est une chose qui permet à tout un chacun d’exister indépendamment des autres et de s’évader des difficultés quotidiennes, c’est la littérature, l’imagination, les mots qui nous saisissent au gré des pages pour nous transporter infiniment loin.

En miroir de Raisons et sentiments, Prudence et passion revisite avec brio le classique de Jane Austen en le transposant dans la France contemporaine, où deux soeurs héroïnes - l’une incarnant la modération, l’autre la spontanéité - se questionnent et questionnent le monde.


Bibliographie

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Le nuage fou

L’Observatoire - 2023

Au XVe siècle, dans le Japon médiéval, Kotaro et Hikojiro, deux intouchables, grandissent avec un seul rêve : intégrer l’escadron des jardiniers du shogun et marcher dans les pas de leur modèle, le grand moine zen, Ikkyu Sojun. Les frasques et provocations de ce moine rebelle marquent l’époque autant que ses prodigieux talents. Tout enfant, il est arraché à sa mère, suit l’enseignement rigide des monastères et connaît enfin l’éveil, lors d’une promenade méditative, lorsqu’il entend le « chant du corbeau ». Suivent trente ans d’errance. Refusant les titres et les honneurs, cet électron libre poursuit son zen à lui, passe du temple au bordel, tombe sur le tard follement amoureux d’une chanteuse aveugle, écrit de sublimes poètes érotiques qu’il jette au vent… À si bonne école, comment les deux parias parviendront-ils à sortir de leur misère ?