Dim. à partir de 14h, Théâtre Chateaubriand

Après-midi autour du Prix Nicolas Bouvier

4 juin 2022.
 

Penser la frontière

« Je veux raconter des lieux, mais avant tout des gens, et faire ressurgir une mémoire ». « Les personnes qui habitent à la lisière ont peut-être quelque chose à nous apprendre sur les limbes », écrit Kapka Kassabova dans son introduction. Une rencontre avec la poète et romancière d’origine bulgare, lauréate du prix Bouvier en 2020 pour Lisière. Après avoir exploré la zone grise, baignée de mythes et de légendes, entre la Grèce et la Turquie, elle investit dans son nouveau récit L’écho du lac, les bords des lacs Ohrid et Prespa, entre Albanie, Grèce et Macédoine du Nord. Une non-fiction qui prouve que les peuples des Balkans ont bien plus en commun que leurs discordes.

Remise du prix Bouvier 2022 à Emilio Sánchez Mediavilla

Rencontre avec le lauréat 2022, Emilio Sánchez Mediavilla. Avec son récit Une Datcha dans le Golfe, le journaliste et éditeur espagnol nous livre un témoignage érudit, drôle et captivant sur sa vie à Bahreïn, qui explore aussi toutes les facettes de cette monarchie insulaire méconnue. Une première non-fiction très aboutie, pour celui qui a créé Libros del Ko, une maison d’édition spécialisée dans le récit littéraire. Un prix remis avec le soutien de Madame Éliane Bouvier.

L’usage du monde

Une rencontre avec Guillaume Jan, qui met en scène dans son roman Alias Lejean la vie de son (presque) homonyme, explorateur du XIXe siècle ; le portrait d’un homme rêveur, libre, brillant et sauvage. Pedro Cesarino, anthrolopogue spécialisé dans les relations entre anthropologie, art et littérature, signe avec L’attrapeur d’oiseaux une “fiction ethnologique”. Mateusz Janiszewski, brillant représentant de la nouvelle école polonaise du journalisme littéraire, part sur les traces d’Ernest Shackleton en Antarctique dans Un arc de grand cercle et nous livre un récit très personnel.

Ces rencontres seront suivies de la projection du film Le Nomade, sur les traces de Bruce Chatwin de Werner Herzog.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

L’écho du lac

Marchialy - 2021

« Dans notre lignée de femmes, je représente la quatrième génération à émigrer. » C’est pour rompre cette spirale de l’exil que Kassabova se rend aux sources de son histoire maternelle, les lacs d’Ohrid et Prespa, les deux plus anciens lacs d’Europe. Elle parcourt leurs rives, grimpe les montagnes alentour, se baigne dans leurs eaux et, au gré de ses rencontres – gardien d’église troglodyte, guide ou pêcheur –, collecte les histoires agitées de cette région des Balkans située à cheval entre la Macédoine du Nord, l’Albanie et la Grèce. Tous ses habitants sont issus de familles qui ont été à un moment donné dispersées, que ce soit à cause de la chute de l’Empire ottoman, des guerres ou des régimes autoritaires. Tous ont hérité d’une façon ou d’une autre de l’histoire de leurs ancêtres.

Kapka Kassabova jongle avec les registres et mêle habilement récits familiaux, légendes locales et faits historiques pour mener une réflexion à la fois intime et universelle sur l’identité, celle dont nous héritons et celle que nous façonnons.

Traduit de l’anglais par Morgane Saysana.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Une datcha dans le Golfe

Anne-Marie Métailié - 2022

Un premier récit sur les contradictions des pays du Golfe qui allie ce qu’il y a de mieux dans la littérature de voyage et le reportage. Un auteur qui marie la finesse du regard de Chatwin à l’humour de Guy Delisle.

Lire ce livre s’apparente à boire un verre dans un bar avec un inconnu, un inconnu intéressant. Ce premier récit est l’histoire d’un journaliste qui a vécu à Bahreïn mais qui n’était pas sensé y aller. Il nous raconte son voyage, d’abord avec l’étonnement d’un premier regard, puis avec la profondeur d’un excellent chroniqueur : des détails les plus simples (et pourtant invraisemblables), comme chercher une maison à louer, jusqu’aux détails plus précis de l’implantation chiite dans les pays du Golfe.

La voix de l’auteur, sérieuse et profonde quand il faut, mais aussi candide, drôle et subjective, se balade entre la finesse du regard et humour, loin de l’attitude du vaillant reporter de guerre qui a tout vu et tout vécu. C’est pourquoi on a envie de le suivre, parce qu’on se sent proche de lui, et on l’écoute nous décrire les subtilités géopolitiques du Moyen-Orient mais aussi la visite rocambolesque de Michael Jackson à Bahreïn, les manifestations et repressions de 2011 et les menus des restos des expatriés, la construction des îles artificielles faramineuses et le sort de la moitié de la population, composée d’esclaves modernes.

En prenant ce qu’il y a de mieux dans le récit de voyage et dans le reportage, ce récit nous émerveille en nous montrant l’une des meilleures qualités d’un livre de non-fiction : il rend passionnant un sujet auquel nous ne nous serions jamais intéressés si on n’avait pas rencontré ce type sympa et intéressant au bar.

Traduit par Myriam Chirousse.

 

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Témoignage

Un arc de grand cercle

Noir sur Blanc - 2022

En 1914, Ernest Shackleton partait à bord de L’Endurance pour un voyage en Antarctique qui resterait dans l’histoire par sa tournure tragique et sa fin miraculeuse. Un siècle plus tard, un équipage polonais prend la mer pour refaire le parcours de l’expédition légendaire. Mateusz Janiszewski, tout jeune chirurgien, voyageur et écrivain, en est l’un des capitaines. Depuis la Patagonie, à travers les mers les plus effroyables, le périple, qui ne devait durer que quelques mois, se révèle pour l’auteur une expérience à la fois terrifiante et initiatrice.

Janiszewski interroge ses souvenirs de lecture de Melville et Conrad, à mesure qu’il affronte la rudesse du paysage patagon, les vents glacés de l’océan Austral et, surtout, ses propres faiblesses. Il est parfois submergé par l’euphorie (« Accroché au gouvernail, je ne sais plus qui dirige qui. Mais dans cette danse, je suis à ma place »), et peu après il éprouve un immense désarroi devant l’inanité des ambitions humaines.

Avec ce grand reportage littéraire, empreint de poésie et de réflexion philosophique, Janiszewski nous entraîne dans un monde extrêmement hostile, « capable de vous tuer », mais aussi de vous révéler à vous-même.

Traduit du polonais (Pologne) par Laurence Dyèvre.

 

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Romans

Alias Lejean

Stock - 2022

Il a cartographié les montagnes et les plaines des Balkans pendant six années. Il est parti chercher la source du Nil en 1860, bien avant David Livingstone. Il a été légèrement diplomate sur la mer Rouge, a poussé une mission de reconnaissance jusqu’aux contreforts de l’Himalaya sur les traces d’Alexandre Le Grand et de Marco Polo. Guillaume Lejean, né Guillaume Jean dans le Finistère en 1824, a passé son adolescence à vagabonder en Bretagne avant de devenir journaliste à Paris, puis cartographe réputé (il était membre de la Société de géographie, admiré par Jules Verne ou Napoléon III). Mais, touche-à-tout et désordonné, il est mort à 47 ans avant d’avoir eu le temps de terminer la plupart de ses travaux.

L’écrivain Guillaume Jan, son presque homonyme, découvre une ribambelle de points communs avec cet aïeul rêveur, libre, brillant et sauvage. Les deux hommes ont grandi dans la même extrémité de la Bretagne, ils ont le même tempérament, les mêmes ambitions. La même humeur vagabonde les a conduits aux mêmes endroits sur la carte du monde : le hasard de leurs voyages les a fait dormir dans les mêmes criques au bord de l’Adriatique, longer les mêmes rivières en Bretagne, en Bulgarie ou en Perse, et une même passion pour l’Afrique les anime. Avec sa plume fluide, jamais dénuée d’humour, Guillaume Jan enquête sur cet ancêtre idéal. Et mesure à quel point le monde a changé entre le XIXe siècle pré-colonial et le XXIe post covid – entre une époque où tout paraissait possible grâce au progrès et une autre qui redoute chaque prochain cataclysme.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

L’attrapeur d’oiseaux

Rivages - 2022

Après avoir essuyé plusieurs échecs sur son terrain de recherche, un anthropologue désenchanté se lance une fois de trop au cœur de « l’enfer vert » amazonien, dans le vague espoir d’enfin recueillir le récit du mystérieux mythe de l’attrapeur d’oiseaux, qui l’obsède. Quadra célibataire et mélancolique, c’est presque à contrecœur qu’il retourne auprès de sa famille amérindienne adoptive, où rien ne se passe comme prévu. De faux pas en impairs, il va faire l’expérience fatidique des limites du langage et de l’impossible communion des narrations du monde.

À 43 ans, Pedro Cesarino est l’un des plus brillants anthropologues de sa génération. « L’Attrapeur d’oiseaux », sa première incursion dans la fiction, est une satire à la fois mordante et fantasmagorique de sa propre pratique.

Traduit par Helene Melo.