Lun. 16h30, Magic Mirror 2 (Grands Débats)

Transfuges, écriture et exil

9 juin 2019.
 

Qu’ont à nous dire ceux qui, nés dans une culture, ont choisi, ou dû, vivre dans une autre – ce que Salman Rushie disait, en s’y incluant, des « hommes traduits » ? Ne tendons-nous pas à devenir tous des « hommes traduits » ? Vivant le télescopage en eux de deux ou plusieurs cultures, faisant œuvre de leurs différences et de leurs tensions, le mettant en forme dans la trame mouvante d’un récit ? Roman, poème, musique : là est la clé d’un vivre ensemble.

Avec Ma Jian, Ece Temelkuran, Inara Verzemnieks et Atiq Rahimi.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

China Dream

Flammarion - 2018

Chargé d’appliquer le programme du Nouveau Rêve Chinois, officiellement lancé par le président Xi Jinping, un cadre dirigeant est poursuivi par des souvenirs qui viennent perturber son travail. Certains cauchemars le ramènent au temps où ses parents ont été les victimes de la répression aveugle qui sévissait à l’heure de la révolution culturelle. Ces visions qui l’assaillent et lui font bientôt découvrir le destin tragique de ses parents viennent totalement gripper les rouages de la mécanique de propagande du régime et
signent l’arrêt de mort du malheureux dirigeant.
Mélangeant mythes et réalité, jouant avec tous les ressorts de l’absurde et du grotesque, ce roman fait le portrait de la Chine d’aujourd’hui gouvernée par le mensonge et la violence, à la merci d’un matérialisme sans frein. Dans cette fable cruelle, Ma Jian dévoile l’une des facettes les plus effrayantes de la tyrannie, qui consiste à tenter d’effacer la mémoire pour éradiquer les événements passés qui gênent la marche actuelle du pouvoir.


 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

Comment conduire un pays à sa perte. Du populisme à la dictature

Stock - 2019

« Comment et pourquoi un populiste sans pitié, avec l’aide d’une bande de partisans toujours plus nombreux, a pu mettre fin à la démocratie turque au cours de la nuit du 15 juillet 2016 est une histoire longue et compliquée. Le propos de ce livre n’est pas de raconter comment nous avons perdu notre statut de démocratie, mais d’essayer d’en tirer des leçons au profit du reste du monde. Chaque pays, bien évidemment, s’inscrit dans un contexte qui lui est propre, et certains choisissent de croire que leur démocratie bien éprouvée et leurs solides institutions les protègent de pareilles « complications ». Toutefois, les similitudes, si frappantes, entre ce que la Turquie a traversé et ce que le monde occidental a commencé à vivre peu après, sont trop nombreuses pour être ignorées. »

Dans ce livre ambitieux, passionné et provocateur, Ece Temelkuran dissèque la montée du populisme dans le monde. Elle révèle les schémas et explore les causes profondes et les différentes façons dont les pays, mêmes les nôtres, peuvent sortir de la démocratie sans s’en apercevoir. Pour la journaliste, les soulèvements récents survenus en Turquie font partie d’un phénomène mondial qui doit servir d’avertissement aux pays occidentaux ayant encore la possibilité de rompre avec ce schéma. Puisant aussi bien dans sa propre expérience que dans l’Histoire, Ece Temelkuran expose une pensée clairvoyante et incisive pour la défense de la démocratie.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Témoignage

Mémoires des terres de sang

Hoëbeke - 2019

“On présume depuis longtemps, dans cette région où ma grand-mère est née, qu’à un certain moment chaque année, les morts rentrent à la maison”, écrit Inara Verzemnieks dans ce récit de déchirant de guerre, d’exil, et de reconnexion.

Les histoires de sa grand-mère rappelaient un unique foyer : la ferme familiale en Lettonie abandonnée durant la seconde guerre mondiale. Là, sa grand-mère, Livija, et sa grand-tante, Ausma, ont été séparées. Livija a fui le conflit et est devenue une réfugiée ; Ausma a été exilée en Sibérie, sous Staline. Les deux sœurs ne se sont pas revues durant plus de cinquante ans.
2levée par ses grands-parents dans l’état de Washington, Inara a grandi parmi des expatriés, dispersant sur les cercueils des défunts du sable letton entré clandestinement aux États-Unis, entonnant des chants populaires d’un pays qu’elle n’a jamais visité. Dans une boîte contenant les affaires de sa grand-mère, Inara découvre l’écharpe que Livija portait lors de son départ. Ce vestige tangible du passé lui montre le chemin jusqu’au village isolé où la famille s’est désagrégée. En Lettonie, Inara apprend à connaître Ausma, sa famille, leur pays ainsi que ses histoires. Là, elle reconstitue les années de survie de Livija en tant que réfugiée.

En tissant ensemble ces deux parties de l’histoire familiale dans une prose lyrique et envoûtante, Inara Verzemnieks nous livre un témoignage cathardique de l’amour, de perte et de survie.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Si seulement la nuit

P.O.L. - 2022

Confinés séparément, le père et la fille ont entretenu un échange épistolaire en 2020 pour s’encourager, raconter à l’autre son quotidien et se donner des nouvelles rassurantes. Mais très vite leur correspondance, émouvante et inquiète, s’assombrit, vire à l’écriture tourmentée de soi, et s’engage dans le récit d’une famille bouleversée par la politique, l’exil et l’art.

Le père, écrivain et cinéaste d’origine afghane, est incapable d’écrire un mot de fiction, de reprendre l’écriture de son roman. Il se croit alors enfermé dans un monde virtuel. Sa fille, née en France de parents exilés, étudiante en art dramatique, s’interroge sur son identité réelle. Ce sont ses mots et ses interrogations, à elle, qui ramène son père à la réalité du monde actuel, et à la réminiscence de son passé douloureux, volatile. Le passé ressurgit entre eux comme un fantôme encombrant, et que le père et la fille ont bien du mal à partager.

Alors que les nouvelles de l’Afghanistan sont chaque jour de plus en plus angoissantes, le père parvient à raconter ce qu’il n’avait jamais dit à sa fille : la fuite de Kaboul, l’invraisemblable périple jusqu’au Pakistan, la famille, les amis abandonnés ou disparus.
Ainsi deux générations, en s’écrivant, racontent le monde, la vie et les sentiments d’une famille exilée. Le père vit dans la nostalgie et l’inquiétude des événements, la fille s’interroge sur son identité et veut croire en l’avenir. Une transmission est-elle encore possible ? Et derrière les mots échangés, qui se révèle ? et qui se cache toujours ?