Le plus voyageur des écrivains brésiliens. De la Mongolie à la Tchechénie, c’est toujours le Brésil qui parle à travers lui, ses rythmes, ses images, sa fantaisie, son art des contradictions et des télescopages. Correspondant dans les années 1990 à Paris et New York pour le grand quotidien brésilien Folha de S. Paulo, Bernardo Carvalho s’est imposé comme figure majeure de la littérature brésilienne contemporaine, dès son premier recueil de nouvelles Aberration en 1993 qui connut un formidable succès. Y figurent déjà les leitmotiv qui composent sa future œuvre très prolifique : intrigues complexes, narrations imbriquées, genres littéraires et style morcelés, personnages multiples, époques entremêlées… formidable dédale dans lequel le lecteur lui-même doit devenir un personnage actif pour résoudre les énigmes et s’en sortir !
Les Initiales, roman paru en 2002, en offre sans doute le paroxysme puisqu’il nous confronte à l’obsession d’un secret dont le narrateur ne parvient à déchiffrer le sens. Néanmoins, un repère est souvent présent dans ses récits, le Brésil, véritable point d’ancrage. Dans Les Ivrognes et les somnambules, traduit en 1998, les personnages naviguent à la recherche d’un tableau entre les États-Unis et le « pays du carnaval ». Il en va de même pour Neuf nuits, roman qui revient sur le suicide de l’anthropologue nord-américain Buell Quain au cours d’une de ses expéditions chez les indiens Krahô, en Amazonie, au mois d’août 1939. Ce roman fait converger la fiction pure et le documentaire, imbrique des recherches historiques et ethnographiques avec des passages autobiographiques, mêle un style lyrique et poétique à une écriture journalistique factuelle. C’est surtout un roman passionnant, très sombre, plein d’angoisse et de mystères irrésolus, qui se présente comme une enquête sur la disparition d’un homme.
Si la construction de ces romans est toujours protéiforme, les sujets reflètent son goût du voyage : Asie centrale avec Mongolia, paru en 2004, où il nous décrit la placidité des steppes d’Asie centrale (prix Jabuti). Le soleil se couche à São Paulo, paru en 2008, alterne entre le Japon de la Seconde Guerre mondiale et le Brésil contemporain, où réside la plus forte communauté nippone du monde.
Son dernier roman, ‘Ta mère, souvent qualifié de "roman russe", nous entraîne de Saint-Pétersbourg à Grozny (Tchétchénie), de l’indépendantisme tchétchène aux trafiquants d’Amérique du Sud. Il suit le destin de trois familles mêlées à ce conflit du Caucase, mais surtout de trois femmes, de trois mères, prêtes à tout pour protéger leurs fils des ravages de la guerre. Chaque personnalité, chaque génération, chaque destin livre ses béances dans des micro-épisodes électriques, qui s’enchaînent avec ivresse. "Bernardo Carvalho a l’art d’animer des pantins, robotisés par l’Histoire et par la guerre, pour leur donner rage et conscience" (Télérama).
Bibliographie :
- ’Ta mère (Anne-Marie Métailié, 2010)
- Le soleil se couche à São Paulo (Anne-Marie Métailié, 2008)
- Neuf nuits (Anne-Marie Métailié, 2005)
- Mongolia (Anne-Marie Métailié, 2004)
- Les Initiales (Rivages, 2002)
- Les Ivrognes et les somnambules (Rivages, 1998)
- Aberration (Rivages, 1997)