Après le bac, il intègre l’INALCO (Institut National des Langues et Civilisations Orientales) où il étudie l’Arabe et le Persan. Et puis, en 1993, c’est le temps des voyages : sans véritable projet, au gré des occasions, Mathias Énard gravite autour de la Méditerranée principalement : Téhéran, Le Caire, Damas, Soueida, Beyrouth où il se pose plus longuement, Tunis, puis, en 2000, Barcelone où il s’arrête pour de bon. Dans ses valises, de huit ans d’errance, il ramène d’innombrables témoignages, d’insoupçonnables parts de l’Histoire.
Entré en littérature en 2003 avec La Perfection du tir, où l’on se tenait au plus près d’un sniper dans un pays ressemblant furieusement au Liban, il s’est imposé comme l’un des grands auteurs de sa génération grâce à son quatrième roman, Zone, un monologue sans ponctuation qui se déroule au cours d’un périple ferroviaire entre Milan et Rome. Ce prodigieux roman sur les guerres du XXème siècle, obtient le Prix Décembre et le Prix du Livre Inter en 2008.
En 2010, il publie un nouveau roman au titre prometteur Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants. Direction Constantinople cette fois-ci, dans les pas d’un certain Michel-Ange venu à la rencontre des beautés de l’art ottoman. Ce livre a obtenu le prix Goncourt des lycéens en 2010.
Un an plus tard, Mathias Énard suit dans Rue des voleurs le parcours de Lakhdar, jeune marocain amateur de « romans de gare », du Maghreb en révolution aux rives d’une Europe au bord du gouffre. Roman d’aventure, récit de voyage, polar, hommage à la littérature populaire dont raffole son personnage principal, Rue des voleurs raconte à travers l’histoire de la transformation de son héros, la complexité d’une identité en mouvement. Un roman d’un souffle rare, initiatique et politique, dont les pages raisonnent du fracas des Printemps arabes.
Dans Tout sera oublié, Mathias Énard et Pierre Marquès unissent leurs talents et livrent un roman graphique dans lequel les mots de l’un et les images de l’autre plongent le lecteur dans la mémoire douloureuse de la guerre des Balkans. C’est alors la troisième rencontre artistique pour ces deux amis puisqu’en 2007 ils avaient publié ensemble le jouissif Bréviaires des Artificiers et réalisé en 2009 un album pour enfants intitulé Mangée, mangée ! Un conte balkanique et terrifique.
Avec Boussole, exploration onirique et éblouissante de l’orientalisme, l’écrivain érudit a « essayé de reconstruire cette longue histoire, celle de l’amour de l’Orient, de la passion de l’Orient, et des couples d’amoureux qui la représentent le mieux (…). Sans oublier ce qu’il peut y avoir de violent et de tragique dans ces récits, de rapports de force, d’intrigues politiques et d’échecs désespérés. Ce long voyage commence à Vienne et nous amène jusqu’aux rivages de la mer de Chine ; à travers les rêveries de Franz et les errances de Sarah, (il a) souhaité rendre hommage à tous ceux qui, vers le levant ou le ponant, ont été à tel point épris de la différence qu’ils se sont immergés dans les langues, les cultures ou les musiques qu’ils découvraient, parfois jusqu’à s’y perdre corps et âme. » (Mathias Énard)
Retour en France, plus précisément dans les Deux-Sèvres qui l’ont vu naître, pour son nouveau roman, Le Banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs. On y suit un apprenti ethnologue quittant Paris pour s’installer dans un village du Poitou, où il compte mener une expérience de terrain. Bâti comme un journal de bord, le récit mêle son protagoniste à une galerie de personnages hauts en couleur et nous emporte dans une danse macabre farfelue.
Bibliographie
- Le Banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs (Actes Sud, 2020)
- Désir pour désir (Réunion des musées nationaux, 2018)
- Dernière communication à la société proustienne de Barcelone (Inculte/Dernière Marge, 2016)
- Boussole (Actes Sud, 2015)
- Tout sera oublié, illustré par Pierre Marquès, (Actes Sud, 2013)
- Rue des voleurs (Actes Sud, 2012)
- L’Alcool et la Nostalgie (Inculte, février 2011)
- Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants (Actes Sud, 2010) Prix Goncourt des lycéens
- Zone (Actes Sud, 2008) Prix Décembre 2008, Prix du Livre Inter 2009
- Bréviaire des artificiers, illustrations de Pierre Marquès (Verticales, 2007)
- Remonter l’Orénoque (Actes Sud, 2005)
- La Perfection du tir (Actes Sud, 2003) Prix des cinq continents de la francophonie, Prix Edmée de La Rochefoucauld
En tant que traducteur :
- Yasser Arafat m’a regardé et m’a souri : Journal d’un combattant, par Yussef Bazzi (Verticales, 2007)
- Epître de la queue : Suivi de Douze séances salées de Mohammad Ibn Mansûr Al-Hilli (Verticales, 2004)