Eka Kurniawan est le nouveau grand nom de la littérature indonésienne, donné comme successeur de Pramoedy Ananta Toer, l’écrivain dissident mort en 2006. Inspiré par les contes de sa grand-mère et les livres abandonnés par les touristes que son père ramenait à la maison, il commence à écrire à l’âge de 11 ans. En découvrant, sur les bancs de l’université, le massacre de 1965, il prend conscience de toute l’histoire cachée de son pays ; il rencontre alors Pramoedy Ananta Toer et devient, comme lui, romancier, activiste et journaliste.
La comparaison entre les deux hommes s’arrête là : le regard d’Eka Kurniawan sur l’Indonésie n’appartient qu’à lui, tout comme son style. Il explique : « Une chose que j’avais en tête, c’était d’écrire d’une manière qui me correspondait, j’avais envie d’utiliser une langue du quotidien, des dialectes, leur associer des traditions de la culture indonésienne. » (France Culture). En 2015, Sabine Wespieser publie L’Homme-Tigre, une enquête psychologique sur les raisons qui poussent à commettre un meurtre, inspirée d’un mythe javanais.
Les Belles de Halimunda, dont la traduction française est sortie en 2017, est en réalité son premier roman. Dans un style à la fois lyrique et truculent, Eka Kurniawan nous montre une lignée de femmes de caractère, dont la beauté fait leur malheur. C’est une histoire de mythes et de fantôme, où les jeunes filles s’envolent et les esprits apprennent la lecture aux enfants. C’est aussi un roman d’un réalisme cru, retraçant les souffrances de femmes prostituées ou bien mal aimées, prises au piège dans la douloureuse histoire de l’Indonésie. Le résultat de ce savant mélange est un roman passionnant et très drôle, véritable coup de maître.
Bibliographie
- Les Belles de Halimunda (Sabine Wespieser Editeur, 2017)
- L’Homme-Tigre (Sabine Wespieser Editeur, 2015)