HEIN Christoph

Allemagne

Le Noyau Blanc (Métailié, 2016)

©Philippe Matsas

Ecrivain incontournable de la littérature allemande contemporaine, Christoph Hein est à la fois un écrivain de l’ex-RDA et de l’Allemagne réunifiée. Né « à l’Est », il a vu s’effondrer le système communiste avec le Mur de Berlin, remplacé par le capitalisme de la RFA : il a fait de la société allemande la matière de ses romans. Christoph Hein est un écrivain éminemment engagé : il se veut chroniqueur de la société dans laquelle il vit.
Il est né en 1944 à Heinzendorf, en Silésie, que sa famille quitte en 1945 pour s’installer dans une petite ville de Saxe. La RDA ne permet pas à ce fils de pasteur de fréquenter le lycée. Il fit donc des études secondaires dans un lycée de Berlin-Ouest (1958-1960). Après la construction du Mur, la RDA refuse, avec la même logique, à celui qu’elle avait contraint à faire des études à Berlin-Ouest, l’inscription à l’université. Tour à tour monteur, libraire, garçon de café, journaliste, acteur et assistant de Benno Besson à la Volksbühne, il peut finalement étudier la philosophie et la logique à Leipzig et Berlin (1967-1971).
Après ses études, il retourne au théâtre, à la Volksbühne, d’abord comme conseiller littéraire, puis comme auteur maison. Il quitte ses fonctions en 1979 pour se consacrer complètement à l’écriture. D’abord célèbre pour son œuvre dramatique – il a écrit une vingtaine de pièces de théâtre – Christoph Hein est devenu du jour au lendemain un écrivain de renom avec la publication de ses premiers récits : Invitation au lever bourgeois en 1980 (Alinéa 1989) puis L’Ami étranger en 1983 (Alinéa 1985 ; Métailié 2001), qui fut traduit en plus de quinze langues. Suivent trois romans : La Fin de Horn en 1985 (Alinéa 1987 ; Métailié 1999), Le Joueur de tango en 1989 (Alinéa 1990), Le Jeu de Napoléon en 1993 (Métailié 1997) et de nombreux essais. Il a mis en scène plusieurs pièces de théâtre dont Ah Q, déjà mise en scène en France. Il est également l’auteur d’un livre pour enfants, Les Grandes Découvertes de Jacob, publié par Flammarion - Castor poche.

Écrivain malmené par les autorités de la RDA, censuré dans son théâtre et dans ses romans, Christoph Hein est devenu dans les années 1980 une instance morale dans laquelle les citoyens critiques ou dissidents ont trouvé les nourritures intellectuelles qui leurs étaient nécessaires pour se libérer de la dictature. Ses interventions publiques en 1989, ses mises en garde contre l’euphorie qui suivit la chute du Mur, ses prises de parole dans l’Allemagne réunifiée en ont fait l’un des intellectuels allemands les plus importants à côté de Christa Wolf et de Günter Grass. Ni l’ère nouvelle qui s’est ouverte ensuite pour l’Allemagne, ni la nouvelle société née de la réunification n’ont affaibli la lucidité critique du romancier. Willenbrock (2001), Prise de territoire (2006), Paula T. Une femme allemande (2010), Le Noyau blanc (2016), tous parus chez Métailié, déroulent une chronique sans complaisance de son propre pays.

Le Noyau Blanc est l’histoire d’un oublié de la société, un universitaire dont les recherches n’intéressent personne et à la vie personnelle guère plus enthousiasmante : divorcé, en redressement judiciaire, seul. Un roman sur les oubliés d’une société qui avance à grande vitesse. Une réflexion sur l’intégrité et la valeur de l’argent.


Bibliographie

  • Le Noyau blanc, traduit par Nicole Bary (Métailié, 2016)
  • Paula T. une femme allemande, traduit par Nicole Bary (Métailié, 2010)
  • Prise de territoire, traduit par Nicole Bary, (Métailié, 2006)
  • Dès le tout début, traduit par Nicole Bary, (Métailié, 2002)
  • Willenbrock, traduit par Nicole Bary, (Métailié, 2001)
  • Le Jeu de Napoléon, traduit par Nicole Bary, (Métailié, 1997)
  • La Mise à mort, traduit par Nicole Bary, (Métailié, 1995)
  • Le Joueur de tango, traduit par François Mathieu (Alinéa, 1990)
  • La Fin de Horn, traduit par François Mathieu, (Alinéa, 1987 ; rééd. Métailié, 1999)
  • L’Ami étranger, traduit par François Mathieu et Régine Mathieu (Alinéa, 1985 ; reéd. Métailié, 2001)
  • Invitation au lever bourgeois, traduit par François et Régine Mathieu (Alinéa, 1989)
  • Entre chien et loup : la véritable histoire de Ah Q, traduit par François Rey (l’Avant-Scène, 1985)
Le Noyau blanc

Le Noyau blanc

Métailié - 2016

Rüdiger Stolzenburg a presque la soixantaine. Chargé de cours à l’université de Leipzig, il n’a aucune chance de voir sa carrière universitaire progresser – son champ de recherches, le librettiste et topographe Weiskern, n’intéresse personne, et de toute façon c’est le département tout entier qui est menacé. Sa vie privée n’est guère plus enthousiasmante, bien qu’il collectionne les femmes, jeunes, voire même très jeunes, et piétine allègrement l’amour de la seule femme qui tienne vraiment à lui. De plus le fisc vient de lui notifier un redressement d’impôts qu’il ne peut absolument pas payer
Rüdiger croit voir sa chance tourner quand une proposition lui parvient via Internet : un collectionneur cherche un acquéreur pour des manuscrits inédits et inconnus de Weiskern. Pris d’une passion furieuse pour ces textes, il remue ciel et terre pour trouver l’argent, et envisage même de se laisser acheter en échange d’un diplôme.
Christoph Hein analyse à sa manière sobre et incisive la façon dont la chute du Mur et la réunification ont profondément modifié le cours de la vie des Allemands de l’Est. Son héros, naïf, mal à l’aise avec les règles d’une société dans laquelle chacun est en concurrence avec tous pour conquérir sa place au soleil, est l’éternel perdant de ce nouvel ordre du monde.


Revue de presse

  • “L’écrivain de l’ancienne RDA, plongé dans le nouvel ordre des choses, n’a rien perdu de sa perçante acuité. Obstinément rigoureux, tranquillement implacable.” (Jean-Claude Lebrun, L’Humanité)
  • “Dans un style sobre (narration factuelle au présent de l’indicatif, peu ou pas de psychologie) et sur un ton réaliste et légèrement caustique, Hein offre un portrait pathétique du travailleur intellectuel moderne, espèce en voie de d’extinction au milieu d’un monde gouverné par la violence décomplexée et l’argent-roi. Le roman, malgré tout, ne manque pas de drôlerie. Stolzenburg, en fait, parvient à nous faire rire de lui-même. prouvant qu’il reste toujours le détachement et l’autodérision, pour rester digne dans la débâcle.“ (Bernard Quiriny, L’Opinion)

Idéologies : la peur du vide, difficile liberté

Avec Christophe Hein, Gérard Mordillat, Jaroslav Rudis, Pascal Manoukian - Saint-Malo 2017

Avec Christophe Hein, Gérard Mordillat, Jaroslav Rudis, Pascal Manoukian
Animé par Hubert Artus