La vie moderne

Raymond Depardon (Palmeraie et désert/2008/90’)

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Alors qu’il sillonnait le monde, appareil photo ou caméra au point, c’est à la fin des années 1990 que vint l’idée à Raymond Depardon, un idée un peu folle en termes de production, mais passionnante sur le plan du cinéma : filmer durant dix ans ces paysans de moyenne montagne dont tout porte à croire qu’ils vont disparaître sous l’effet des mutations économiques. Enfant d’agriculteur, il nous fait entrer dans leurs fermes avec un naturel extraordinaire. Après Profils paysans : l’approche (2001), Profils paysans : le quotidien (2005), La vie moderne clôt… du moins provisoirement, la trilogie. Ce film bouleversant parle, avec une grande sérénité, une intimité et une délicatesse rare, de nos racines et du devenir des gens de la terre. Il y a enfin la présence de R. Depardon, la permanence de sa voix hors champ qui tantôt relance avec beaucoup de douceur, tantôt communie dans le silence de ses interlocuteurs. Cette position est sans doute ce qui rend le film si beau, parce qu’elle suggère une histoire intime qui prend la forme, propre à la paysannerie, d’un mouvement cyclique. Celle d’un homme qui a quitté son milieu, et qui revient tardivement à cette question de l’héritage par la voie qui l’en a détourné : la production des images.