GRAND DÉBAT

Historiens et écrivains face à la guerre

LUN. 11H30, MAUPERTUIS (PALAIS DU GRAND LARGE)

A. Hollinghurst, M. Dugain, E. Speller

Rude tâche, pour l’historien, de déchiffrer dans le chaos meurtrier de la
Grande guerre l’ordre souterrain des raisons supposées lui donner sens.
Mais « raison », encore, quand un monde pris de vertige s’autodétruit, avec
une rage aveugle, jusqu’à ne plus rien laisser de lui, ni du plus intime de
chacun ? Comment réduire encore cette guerre à des « conflits d’intérêts »,
calculs de politiques ou de marchands de canons ? Comment ne pas voir
que « quelque chose d’autre » a surgi, au coeur de ce chaos, s’est emparé
de tous et a tout emporté, à commencer par les calculs des fins stratèges ?
« Quelque chose d’autre » a surgi dans le monde – et en soi. Espace halluciné
que pressentent ou explorent artistes et écrivains, quand c’est l’homme
lui-même qui devient un continent inconnu, Conrad au coeur des ténèbres,
Junger, Céline, Breton résumant l’acte surréaliste le plus authentique au
fait de descendre dans la rue et de tirer dans la foule au hasard. Ici, plus
d’ordre, secret ou explicite, de « raisons » à la guerre, plus de « raison de
la guerre », mais un puits noir sans fond au coeur du monde – et au plus
profond de soi. « Ce soir… j’ai vu les bords de l’humanité – j’ai aperçu le
noir et le vide autour de la terre » écrit Teilhard de Chardin au front, que
cite André Glucksmann en ouverture du texte de Junger, La guerre comme
expérience intérieure. « Ce puits sans fond » : ici, nous sommes au coeur
même des enjeux de la littérature, bien loin des postures vaines, des modes
et des bavardages mondains. Où l’historien et l’écrivain se retrouvent face
à face.

Une rencontre avec Alan Hollinghurst, Elizabeth Speller, Marc
Dugain, Pierre Schoentjes
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