BEY Maïssa

Algérie

14 septembre 2021.

De son père, instituteur, mort sous la torture de l’armée française pendant la guerre d’Algérie, Maïssa Bey dit avoir reçu en héritage la langue française, qu’il lui a enseigné avant même qu’elle aille à l’école : « Il m’a transmis cela comme quelque chose de très précieux, car, pour lui, la langue permettait d’aller vers l’autre, de le comprendre ». Elle est l’autrice d’une dizaine de romans, de recueils de poésie et de nouvelles, ainsi que de trois pièces de théâtre, avec toujours en toile de fond cette Algérie natale et plus particulièrement la condition des femmes. 
Dans la lignée, Nulle autre voix, roman percutant, se fait le témoignage bouleversant d’une femme qui soigne les maux avec les mots, après avoir commis l’irréparable aux yeux de la société.

« Mon rapport à la langue française est un rapport d’amour. Je n’ai aucun complexe à écrire et à m’exprimer en français. L’essentiel est de pouvoir dire ce que j’ai à dire, ce que je ressens, mes colères et mes révoltes. Il n’y a pas de différence entre l’intime et l’écrit. » (Jeune Afrique)

 

Née en 1950 à Ksar-el-Boukhari, village de la région de Médéa, Maïssa Bey a suivi des études de Lettres à Alger avant de devenir conseillère pédagogique dans l’ouest algérien.

L’écho positif rencontré par ses premiers écrits sur l’Algérie la pousse à écrire un premier roman, Au commencement était la mer (Marsa Éditions), puis un recueil de nouvelles décrivant son pays déchiré par la violence : Nouvelles d’Algérie (Grasset, 1998), récompensé par le Grand Prix de la Nouvelle de la Société des Gens de Lettres. Son roman Cette fille-là, publié en 2001 aux éditions de l’Aube, consacre cette voix majeure de la littérature méditerranéenne et reçoit le Prix Marguerite Audoux.

Maïssa Bey réside aujourd’hui à Sidi-Bel-Abbès où elle anime une association culturelle : Paroles et écritures. Elle publie en 2008 Pierre Sang Papier et Cendre aux éditions de l’Aube, une fresque poétique sur 132 ans de colonisation française en Algérie qui a été adaptée au théâtre sous le titre Madame Lafrance par Jean-Marie Lejude.

Par une écriture superbe et retenue, Maïssa Bey dénonce la violence de la société algérienne aujourd’hui. Dans son recueil de nouvelles Sous le jasmin la nuit, paru en 2012, elle livre le portrait de onze femmes, onze Algériennes qui se heurtent à l’oppression masculine et voient leurs envies de liberté étouffées.

L’auteur aborde le sujet de l’immigration en 2013 dans une pièce de théâtre, Tu vois c’que j’veux dire ?. Inspirée d’un fait divers, l’histoire met en scène deux jeunes Algériens qui attendent sur le port le passeur qui doit les amener de l’autre côté de la Méditerranée. Cette attente est l’occasion pour ces personnages de livrer les douloureuses raisons de leur exil, entre désespoir et rêve d’un ailleurs.

S’ouvrant sur une citation de Marguerite Duras sur le processus de résilience que procure l’écriture, son dernier roman Nulle autre voix met en scène une femme qui sort de prison après quinze ans de détention, pour avoir tué son mari. Confronté au regard de la société, elle livre son histoire, ses raisons, son ressenti, face à l’opprobe et la violence d’un monde.


Bibliographie :

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Nulle autre voix

L’Aube - 2018

«  Je suis ou je serai bientôt un personnage de roman. Un roman qui aurait pour mots clés : Femme. Meurtre. Prison. Violence. Silence.  »
Elle a tué. Elle a purgé sa peine. Elle se tait. Tout est dit. Jusqu’au jour où une femme vient frapper à sa porte. Pourquoi lui ouvre-t-elle ? Peut-être parce que celle qui se présente comme l’écrivaine a prononcé le mot «  criminelle  ». Elle ne sait pas. D’abord rétive, elle se (dé-)livrera peu à peu. Paroles nues, paroles crues, qui démaillent, point par point, une histoire ancestrale, qui ne se raconte pas.