DUFF Alan

Nouvelle-Zélande

11 mars 2013.
 

Biographie


1990 : alors que s’achève en Nouvelle-Zélande une décennie de "Renaissance Maorie", marquée par la revitalisation de la culture, de la langue ("Te reo") et des pratiques comme le tatouage ("Moko"), Alan Duff lance avec L’Âme des guerriers un véritable pavé dans la mare. A rebours de la fierté Maorie alors de circonstance, ce premier roman d’un réalisme brutal dépeint le quotidien sordide des maoris "des villes". Échoués aux portes d’Auckland, dans des ghettos minés par le chômage et la délinquance, les héritiers de l’épopée ancestrale s’abrutissent d’alcool et se perdent en guéguerres fratricides, dans ce qui s’apparente à un absurde suicide collectif.

Porté à l’écran en 1994 par Lee Tamahori, L’Âme des guerriers dynamite à l’étranger le pittoresque maori : son immense succès fait d’Alan Duff, aujourd’hui installé en France, l’un des rares écrivains néo-zélandais de renommée internationale.

Bien que L’Âme des guerriers se soit vendu à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires et que le film ait battu tous les records au box-office national, Alan Duff est loin de faire consensus au "pays du kiwi".

L’auteur assortit en effet son oeuvre littéraire d’un discours de dénonciation de la victimisation des Maoris, qui se dégagent selon lui de leurs responsabilités en faisant de la colonisation "pakeha" la source de tous leurs maux. Il explicite ses positions en 1993 dans un essai polémique Maori : The Crisis and the Challenge, qui lui vaut les foudres de l’establishment maori, l’accusant de réduire la culture Maorie à ses archaïsmes, tandis que la gauche intellectuelle lui reproche de privilégier une lecture culturelle du problème et de donner des arguments aux "red-necks" locaux.
Attaché à l’initiative individuelle, l’auteur défend un crédo très libéral dans les colonnes du Evening Post et espère donner l’exemple en fondant en 1995 une association financée par ses droits d’auteur : "Books in Homes" qui fournit des livres aux enfants des familles défavorisées.


L’Ame des guerriers

Né en 1950, d’un père "pakeha" (d’origine européenne) et d’une mère maori, Alan Duff a connu une jeunesse chaotique : installé dans la famille de sa mère suite à la séparation du couple, il se fait renvoyer de l’école pour son comportement violent et finit par rejoindre un gang. Bagarres et petits délits le conduisent en maison de redressement puis, à plusieurs reprises, en prison. Renouant avec l’amour des lettres hérité de son père, il commence alors à écrire, dans la veine des auteurs américains qu’il admire : John Steinbeck, Hubert Selby et, surtout, William Faulkner.

Son oeuvre littéraire, largement autobiographique, se construit autour de personnages paumés, en quête de rédemption. Après L’âme des guerriers, il publie Nuit de casse en 1991, l’histoire de Jube et Sonny, l’un Blanc, l’autre maori, ex-taulards et frères de galère, à la dérive dans la périphérie d’Auckland. Puis viennent Les âmes brisées, suite percutante de son premier succès. Dans chacun de ces textes, les apartés, les monologues intérieurs des personnages, leurs commentaires ironiques entre parenthèses contrastent avec l’indigence et la brutalité des dialogues, dans un univers où la violence affleure au moindre prétexte.

Après plusieurs années de silence, Alan Duff publie Un père pour mes rêves (Actes Sud, 2010), dans lequel il évoque en miroir la Nouvelle-Zélande des années 1950 et l’Amérique de la ségrégation raciale, à travers l’histoire de Mark, un jeune maori métis né d’une liaison passagère avec un G.I noir américain.

En 2013, Actes Sud publie Qui chante pour Lu ?, une plongée d’un réalisme violent dans les quartiers populaires de Sydney, à travers laquelle Alan Duff sonde cette fois les fractures de l’Australie ...


Bibliographie :

Essai (en anglais) :


Présentation de Qui chante pour Lu ?

Les anciens quartiers populaires près du port de Sydney se boboïsent. Sur fond de spéculation immobilière, deux milieux s’y côtoient. Lu, jeune serveuse dans un fast-food, et ses amis en veulent aux riches qui s’exhibent désormais sur les terrasses des restaurants. Comme Anna, par exemple, cette jeune étudiante en musique, et son richissime père. Lu décide sur un coup de tête de ne plus être la seule à souffrir de son histoire douloureuse – car pour le sexe c’est la même chose : il y en a qui se servent et d’autres qui subissent. D’un réalisme violent, ce roman parfaitement rythmé offre le portrait aigu de deux mondes que tout oppose.


Présentation de Un père pour mes rêves

Un jeune Néo-Zélandais, fruit d’une brève liaison, pendant la Seconde Guerre mondiale, entre une femme maorie mariée et un soldat noir américain de passage doit apprendre à vivre entre le mépris dont sa communauté accable sa mère et les dangers que fait peser sur lui la tentation d’idéaliser un père inconnu. Par l’auteur de L’Ame des guerriers, un roman puissant et dérangeant sur la violence qui règne au sein de la société maorie et sur la rémanence du racisme dans la société américaine.

Revue de presse :

« Avec Mark, Alan Duff nous plonge dans une communauté maorie pendant les années cinquante, quand les traditions vacillent et se renouvellent, sur fond de rivalités, de hakas et de défis, entre matchs de rugby et offices, avec en toile de fond les inégalités entre Maoris et Pakehas, (les Blancs), qui ne sont rien à côté de ce qui se passe, encore, aux USA au temps de Klu Klux Klan. Un roman choral comme les chants du village, mais où chaque voix exprime, au-delà du rôle social, un destin individuel, un apprentissage de la condition d’homme. » A. N., L’Humanité

« Un roman épique et intimiste, bouleversant et juste. » Christine Ferniot, Télérama

« Bouleversante allégorie sur la nécessité de se libérer de " l’esclavage des idées et des habitudes ", Un père pour mes rêves témoigne des étonnantes analogies que révèle le métissage. » Yves Le Gall, Le Matricule des Anges


Présentation de Les Âmes brisées

Après le suicide de sa fille, dont il fut tenu pour responsable, Jake Heke n’est plus tout à fait comme ses frères maoris de la banlieue d’Auckland. Pour lui, l’ordre des choses semble avoir changé. Cet homme au passé violent, au caractère jusqu’alors méprisable, prétentieux et vulgaire, va tenter de donner un tout autre sens à sa vie en la fondant sur le respect de soi et la rédemption.
Mais dans cette métropole de Nouvelle-Zélande demeurent les paumés, les tueurs et les dealers, les femmes soumises, battues ou calculatrices et les adolescents perdus. Tout un monde sous l’emprise du sordide, une communauté, une famille réinventée organisée et possessive, qui ne laissera pas si facilement l’un des siens s’échapper vers les rives salvatrices de l’intégration.
A travers un livre hanté par l’effroyable destinée des minorités face à la modernité, Alan Duff retrouve les personnages de L’Ame des guerriers (Actes Sud, 1996) mais il s’attache ici plus particulièrement à l’itinéraire tumultueux d’un homme aux prises avec le rôle "tribal" qui lui incombe.
Dans ce puissant roman où lyrisme et oralité s’entremêlent, l’écrivain néo-zélandais déploie les voix de l’intime, du sensible et du charnel pour atteindre à une représentation sans faille du territoire malheureusement universel de la violence urbaine de notre temps.


Présentation de Nuit de casse

Dans ce bar de la périphérie d’Auckland, où aboutit la ligne d’autobus et finit tout espoir en un quelconque avenir, deux ex-taulards se noient dans la bière en compagnie de leurs frères en exclusion. De l’avis de Jube, le Blanc qui ne vit que dans l’attente de la prochaine bagarre, Sonny, son compagnon, métissé de maori, a lu trop de livres et se pose trop de questions.
De ratages en coup foireux, le tandem titube dans un vague rêve de revanche, jusqu’au jour où un casse dans la maison d’un riche architecte semble leur offrir la promesse d’une autre vie.
Dans ce portrait sans concession d’une société qui produit des êtres incapables de communiquer entre eux autrement qu’à travers la violence physique, Alan Duff réussit le tour de force de faire émerger du réalisme impitoyable des situations une forme nouvelle de lyrisme, âpre et désespéré. En contrepoint de la descente aux enfers de Jube, le parcours de Sonny s’inscrit en effet comme une bouleversante tentative d’élévation. Par son intensité dramatique hors du commun, Nuit de casse confirme l’envergure de l’auteur de L’Ame des guerriers.


Présentation de L’Âme des guerriers

Portrait sans complaisance du peuple maori, L’Ame des guerriers décrit les convulsions d’une civilisation à l’agonie dans la sordide banlieue d’une métropole de Nouvelle-Zélande.
Privés d’emploi et de raisons de vivre, cramponnés à l’alcool, les héritiers de l’épopée ancestrale vont de défis absurdes en sanglants affrontements — pitoyable caricature des héroïsmes de jadis. Femmes et enfants paient dans leur chair, et parfois de leur vie, des égarements où se joue l’"honneur" de mâles en plein désarroi. Contre cette fratricide communauté des bas-fonds s’élève alors, violente et rédemptrice, la voix d’une femme, Beth.
Bouleversant hommage à une culture menacée et à des individus entraînés vers une forme de suicide collectif, L’Ame des guerriers a été récompensé par le Pen Club Award 1991 du premier roman, et porté à l’écran en 1995 par Lee Tamahori.


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