Les rencontres de la Fondation Européenne de la Culture
27 septembre 2011.
"L’Autre Europe". Question cruciale, au moment où l’Europe s’ouvre à de nouveaux membres, avec ça et là des réticences perceptibles.
Au moment, aussi où l’Europe s’interroge sur elle-même, sur son histoire, sur les valeurs qui la fondent, sur ses frontières. "L’élargissement e l’Europe" : la perspective d’une Europe se diluant en une vaste zone de libre-échange, ou bien, au contraire, d’une Europe retrouvant une part essentielle d’elle-même, de son histoire, de sa culture - bref, de son "âme" ? "L’Autre Europe" : c’est à dire l’Europe même - et plutôt que d’un condescendant "élargissement", sans doute serait-il plus juste de dire aujourd’hui "réunification"…
L’Europe, depuis trois ans, est au cœur des Rencontres du Livre organisées chaque automne, à Sarajevo par le Centre André Malraux, Etonnants Voyageurs et le Collège International des Traducteurs Littéraires (Arles). Parce que Sarajevo assiégée a posé une question à l’Europe, ou plus exactement à ses valeurs - question à laquelle l’Europe a tardé à répondre, c’est le moins que l’on puisse dire.
Pour nombre d’intellectuels dits "de l’Est", l’Europe était une prodigieuse aventure artistique et intellectuelle dont ils se sentaient partie prenante : la référence, à travers écrivains, artistes, musiciens, à un ensemble de valeurs, sur le sens, le sens de l’art, le sens de l’humain, où ils puisaient la force de résister. D’où la question par eux posée au fil des rencontres : à quelles valeurs croyez-vous encore ? Et si vous n’y croyez plus, quel sens encore, l’Europe ?
Un débat essentiel, que nous avons voulu prolonger à Saint-Malo, en partenariat avec la Fondation Européenne de la Culture (*).
La Fondation Européenne de la Culture parraine quatre rencontres au festival :
- Le samedi 7 juin, L’Autre Europe à 15h00 à l’Auditorium
Avec Boris Pahor, Vidosav Stevanovic, Predrag Matvejevic, Brina Svit et Vladan Radoman - Le samedi 7 juin, projection du documentaire L’été des Tziganes à 16h00 à l’Auditorium, suivie d’une rencontre
Avec Isabel Fonseca, Rajko Dkuric, animée par Jacques Meunier. - Le lundi 9 juin Carnets de Sarajevo à 14h00 à la Rotonde Surcouf
Avec Jean-Marie Laclavetine, Velibor Colic, Brina Svit, Mireille Robin, Vidosav Stevanovic et Rajko Dkuric. - Le lundi 7 juin Elle fut l’âme de l’Europe : la Mitteleuropa à 15h00 au Théâtre Chateaubriand
Avec Georges Arthur Goldschmidt, André Lorant, Stefan Hertmans.
(*) Depuis 1954, la Fondation Européenne de la Culture a pour mission d’encourager la participation et la coopération culturelles en Europe et au-delà des frontières. Sur le plan opérationnel, elle gère ses propres programmes et subventionne des projets innovateurs. Sur le plan politique, la Fondation fait activement pression en faveur de la culture. La Fondation soutient actuellement la dimension culturelle de l’élargissement de l’Union européenne (avec une attention particulière pour ses nouveaux voisins) et de son intégration à travers sa nouvelle ligne d’action ’Enlargement of Minds’.
Pour de plus amples informations : www.eurocult.org
DERNIER OUVRAGE
Romans
Une amie de la famille
Gallimard - 2019
« Le 1er novembre 1968, alors que nous nous promenions sur les rochers qui surplombent la Chambre d’Amour à Biarritz, ma sœur aînée a été emportée par une vague. Elle avait vingt ans, moi quinze. Il aura fallu un demi-siècle pour que je parvienne à évoquer ce jour, et interroger le prodigieux silence qui a dès lors enseveli notre famille. Je suis parti à la recherche d’Annie. Je l’ai vue revenir intacte dans sa fougue, ses doutes, ses enthousiasmes, ses joies et ses colères : une jeune femme d’aujourd’hui. »
- « Magnifique de pudeur et d’élégance. » Sud-Ouest
DERNIER OUVRAGE
Récit
Guerre et pluie
Gallimard - 2024
Velibor Colic a en n écrit le récit de sa guerre, celle qu’il a vécue en 1992, depuis son enrôlement dans l’armée croato-bosniaque lors de l’invasion de la Bosnie par l’armée fédérale ex-yougoslave tenue par les Serbes, jusqu’à sa désertion, qui a marqué le début de sa vie en exil. Il l’avait évoqué dans son tout premier livre, Les Bosniaques, série de brefs récits de guerre, écrit en serbo-croate. C’est ici un projet d’une toute autre ampleur. La première partie raconte l’apparition, vers 2020, alors que l’auteur vit à Bruxelles, d’une maladie rare, provoquant l’éclosion de cloques douloureuses sur le corps et dans la bouche, qui fait revenir à sa mémoire les images des corps en déchéance. Il comprend aussi que si sa langue est attaquée par des aphtes purulents, c’est qu’il a dû s’arracher à sa langue maternelle pour venir habiter le français : le corps dit toutes ces déchirures. La deuxième partie évoque de façon saisissante la vie du jeune soldat de 28 ans jeté dans un univers d’épouvante : la guerre détruit les hommes, mais aussi les animaux, les arbres, tout ce monde de beauté paisible qui avait été le sien. La troisième partie raconte comment, ayant décidé de déserter, l’auteur a réussi à échapper à la guerre, au prix du deuil de tout ce qui avait fait sa vie jusqu’alors.« La mémoire parle une langue étrangère dont nous ne maîtrisons pas tous les signes », écrit Colic. C’est ce qui donne à ce récit son caractère à la fois halluciné et drolatique. L’horreur des tranchées, la déréliction des soldats, les souffrances, tout cet univers d’e4roi où aucune loi n’existe, est contrebalancé par la douceur merveilleuse des souvenirs d’avant – en particulier des souvenirs amoureux, évoqués avec une délicatesse et une poésie qui subjuguent. L’auteur se décrit avec une autodérision parfois enfiévrée de colère, comme un colosse branlant. C’est un livre de révolte mais aussi, paradoxalement, un livre plein de tendresse et de drôlerie, car l’auteur ne se départit jamais de son penchant pour les aphorismes sarcastiques ou absurdes. Ce grand livre est d’autant plus puissant qu’il résonne terriblement avec ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine.
- « « Pendant des années, j’ai cru naïvement que la guerre était sortie de moi. Et qu’avec l’aide de la littérature et de l’écriture j’étais aussi sorti de la guerre. J’ai surestimé la littérature. » Cette confession, Velibor Colic la déroule tout au long de son admirable roman autobiographique Guerre et pluie. Avec ses variations, ses saillies, ses volutes de souvenirs, sa mémoire poisseuse. La guerre, sa guerre de 1992 dans l’ex-Yougoslavie, il l’avait déjà évoquée dans Les Bosniaques, puis dans Chronique des oubliés en 1996, et dans son premier livre écrit directement en français, Archanges, paru en 2008 chez Gaïa. » Le Figaro
- « Avec Guerre et pluie, il signe un récit troublant, dur et lucide, traversé par la nostalgie, parfois l’ironie, sur des mois en absurdie et dans la furie du début du conflit en Bosnie en 1992. Avant le sauvetage et la « grande fierté d’avoir déserté ». » Libération
DERNIER OUVRAGE
Récit
Une ascension
Gallimard - 2022
Un jour de 1979, se promenant dans sa ville natale de Gand, le narrateur tombe en arrêt devant une maison : visiblement à l’abandon derrière une grille ornée de glycines au parfum pénétrant, cette demeure l’appelle. Deux jours plus tard, il la visite et l’achète ; il va y vivre plusieurs années. Ce n’est qu’après l’avoir quittée qu’il découvre que cette maison a également été celle de Willem Verhulst, SS flamand et organisateur de la collaboration belge avec le troisième Reich. Le lieu intime se pare soudain d’une dimension historique : qui était cet homme incarnant le mal qui a vécu entre ces murs ? Comment retracer une existence qui semble impossible à comprendre, comment raconter la vie d’une maison et de ses habitants ? À l’aide de documents et de témoignages, le grand romancier belge Stefan Hertmans nous convie à une enquête passionnante qui entrelace rigueur des faits et imagination propre à l’écrivain. Examen d’un lieu et d’une époque, portrait d’un intérieur où résonnent les échos de l’Histoire, L’ascension est aussi une plongée vertigineuse dans l’âme humaine.