Samedi dès 14h au Théâtre Chateaubriand

Après-midi Mai 68

8 mai 2018.
 

Mai 68 dérange toujours. Sans doute parce qu’il ne rentre pas dans les cadres préétablis. Un vaste mouvement social ? Pas seulement. « Le premier mouvement anticommuniste de masse »  aussi (dixit Daniel Cohn-Bendit). Pour beaucoup, un moment de grâce. Peut-être d’abord une «   révolution culturelle  » prise de parole de la jeunesse, des femmes, «   insurrection poétique   » quand les murs avaient la parole.

Mai 68 : une insurrection poétique ?

À 15h, un hommage à Maurice Clavel, qui fut un peu «   l’esprit de mai  », présenté par Michel Le Bris, la projection du légendaire «  Messieurs Les censeurs, bonsoir !   » quand il quitta le plateau d’À armes égales pour un mot censuré dans le film qu’il avait écrit. Suivi du film de Maurice Clavel, Le soulèvement de la vie (1971), chant de révolte d’une jeunesse en quête de sens face à une société de consommation sans âme.

Tout de suite après à 15h45, une rencontre, «  La beauté dans la rue ?   », avec Romain Goupil, Frédéric Joignot, ancien rédac chef d’Actuel et de Libé (Vite !, Tohu Bohu), Yves Pagès (Tiens, ils ont repeint !, La Découverte), Pascal Ory (qui réédite Entre-deux-Mai, une histoire culturelle de la France, Seuil) et Jean Viard (Chronique française, L’Aube).

Mai 68 : le printemps de Prague

Pour finir la journée Mai 68, à 17 h 30, avec Raphaël Glucksmann et Jan Rubes qui fut le traducteur de Vaclav Havel, précédée du film Mystère d’archives, la fin du Printemps de Prague de Serge Viallet. Les événements de Prague, depuis l’entrée des premiers convois, dans la nuit du 20  août 1968, aux derniers affrontements autour du siège de la radio. La foule, libérée dans les rues et au milieu d’elle, un char russe : les photos de Koudelka ont fait le tour du monde. Face à la liberté, le communisme résumé à un char. On a pu dire que ce jour-là, symboliquement, le rêve communiste était mort.

Leur cauchemar, encore nos rêves ?

La question avait été lancée par Vidosav Stevanovic, lors du festival de 2003 : «   parce que si vous voulez savoir ce qu’est réellement le communisme, nous sommes tous là, venus de l’Est. Nous pouvons tout vous expliquer, le règne du mensonge et de la peur. Mais nous avons compris que vous ne voulez pas, pour pouvoir continuer à tourner votre moulin à prières.   » La question est plus que jamais posée. Avec cette autre : que penser d’une théorie qui fait de sa capacité à transformer le réel sa preuve, et qui foire à chaque fois qu’elle s’affronte au réel ? La faute au réel, vraiment, ou à la théorie ? Adieu à Marx, une bonne fois ? À débattre…
Avec Thierry Wolton, Jan Rubes, Bogdan Teodorescu, Velibor Čolić et Enki Bilal.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

Pour l’amour des livres

Grasset - 2019

« Nous naissons, nous grandissons, le plus souvent sans même en prendre la mesure, dans le bruissement des milliers de récits, de romans, de poèmes, qui nous ont précédés. Sans eux, sans leur musique en nous pour nous guider, nous resterions tels des enfants perdus dans les forêts obscures. N’étaient-ils pas déjà là qui nous attendaient, jalons laissés par d’autres en chemin, dessinant peu à peu un visage à l’inconnu du monde, jusqu’à le rendre habitable  ? Ils nous sont, si l’on y réfléchit, notre première et notre véritable demeure. Notre miroir, aussi. Car dans le foisonnement de ces histoires, il en est une, à nous seuls destinée, de cela, nous serions prêt à en jurer dans l’instant où nous nous y sommes reconnus – et c’était comme si, par privilège, s’ouvrait alors la porte des merveilles.

Pour moi, ce fut la Guerre du feu, « roman des âges farouches  » aujourd’hui quelque peu oublié. En récompense de mon examen réussi d’entrée en sixième ma mère m’avait promis un livre. Que nous étions allés choisir solennellement à Morlaix. Pourquoi celui-là  ? La couverture en était plutôt laide, qui montrait un homme aux traits simiesques fuyant, une torche à la main. Mais dès la première page tournée… Je fus comme foudroyé. Un monde s’ouvrait devant moi…

Mon enfance fut pauvre et solitaire entre deux hameaux du Finistère, même si ma mère sut faire de notre maison sans eau ni électricité un paradis, à force de tendresse et de travail. J’y ai découvert la puissance de libération des livres, par la grâce d’une rencontre miraculeuse avec un instituteur, engagé, sensible, qui m’ouvrit sans retenue sa bibliothèque.

J’ai voulu ce livre comme un acte de remerciement. Pour dire simplement ce que je dois au livre. Ce que, tous, nous devons au livre. Plus nécessaire que jamais, face au brouhaha du monde, au temps chaque jour un peu plus refusé, à l’oubli de soi, et des autres. Pour le plus précieux des messages, dans le temps silencieux de la lecture  : qu’il est en chacun de nous un royaume, une dimension d’éternité, qui nous fait humains et libres. »


 

DERNIER OUVRAGE

 
Bande Dessinée

Bug

Casterman BD - 2017

Dans un avenir proche, en une fraction de seconde, le monde numérique disparaît, comme aspiré par une force indicible. Un homme, seul, malgré lui, se retrouve dans une tourmente planétaire.

Après avoir traité de sujets politiques, géopolitiques (Les Phalanges de l’Ordre Noir, Partie de chasse, avec Pierre Christin), de destins dictatoriaux et de rêves d’immortalité (La trilogie Nikopol), de cauchemars obscurantistes prémonitoires (Le cycle du Monstre), de planète recadrant les humains (La trilogie du Coup de Sang), Enki Bilal nous prive de notre addiction digitale en nous plongeant, non sans une certaine dérision, dans un monde de désarroi et d’enjeux multipolaires…


Revue de presse

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Guerre et pluie

Gallimard - 2024

Velibor Colic a en n écrit le récit de sa guerre, celle qu’il a vécue en 1992, depuis son enrôlement dans l’armée croato-bosniaque lors de l’invasion de la Bosnie par l’armée fédérale ex-yougoslave tenue par les Serbes, jusqu’à sa désertion, qui a marqué le début de sa vie en exil. Il l’avait évoqué dans son tout premier livre, Les Bosniaques, série de brefs récits de guerre, écrit en serbo-croate. C’est ici un projet d’une toute autre ampleur. La première partie raconte l’apparition, vers 2020, alors que l’auteur vit à Bruxelles, d’une maladie rare, provoquant l’éclosion de cloques douloureuses sur le corps et dans la bouche, qui fait revenir à sa mémoire les images des corps en déchéance. Il comprend aussi que si sa langue est attaquée par des aphtes purulents, c’est qu’il a dû s’arracher à sa langue maternelle pour venir habiter le français : le corps dit toutes ces déchirures. La deuxième partie évoque de façon saisissante la vie du jeune soldat de 28 ans jeté dans un univers d’épouvante : la guerre détruit les hommes, mais aussi les animaux, les arbres, tout ce monde de beauté paisible qui avait été le sien. La troisième partie raconte comment, ayant décidé de déserter, l’auteur a réussi à échapper à la guerre, au prix du deuil de tout ce qui avait fait sa vie jusqu’alors.« La mémoire parle une langue étrangère dont nous ne maîtrisons pas tous les signes », écrit Colic. C’est ce qui donne à ce récit son caractère à la fois halluciné et drolatique. L’horreur des tranchées, la déréliction des soldats, les souffrances, tout cet univers d’e4roi où aucune loi n’existe, est contrebalancé par la douceur merveilleuse des souvenirs d’avant – en particulier des souvenirs amoureux, évoqués avec une délicatesse et une poésie qui subjuguent. L’auteur se décrit avec une autodérision parfois enfiévrée de colère, comme un colosse branlant. C’est un livre de révolte mais aussi, paradoxalement, un livre plein de tendresse et de drôlerie, car l’auteur ne se départit jamais de son penchant pour les aphorismes sarcastiques ou absurdes. Ce grand livre est d’autant plus puissant qu’il résonne terriblement avec ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine.


 

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Essais

Vite ! Une déambulation de Frédéric Joignot en Mai 68

Tohu Bohu - 2018

Frédéric Joignot raconte son Mai 68, ses déambulations, ses tribulations de lycéen en classe de terminale. Pas celui d’un dirigeant, pas celui d’un militant «  pur et dur  », pas celui d’un révisionniste plus ou moins marxiste de ce moment suspendu entre deux mondes, mais celui d’un badaud, d’un piéton, les sens en éveil, pour qui la vie a changé radicalement avec ces événements.

Du début à la fin, il a vécu les événements de mai : les manifs, les débats, les rêves éveillés. Il est sorti de son lycée caserne et comme toute une génération, il a étrenné une Liberté qui ne demandait qu’à chanter.

 

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Essais

Ce cher et vieux pays…

Gallimard - 2023

« L’histoire politique de ce pays est, depuis soixante-cinq ans, à contre-courant de la tendance générale de son époque. Il n’est pas sûr que la plupart des Français aient pris conscience de cette originalité. » Pascal Ory

Ces Français sont bien étranges. Comparons le « cher et vieux pays » du général de Gaulle à tous les pays voisins ; que voyons-nous ? L’infinie variété de la démocratie libérale, avec ses régimes foncièrement parlementaires, gagés sur un pouvoir exécutif limité. En face de ce peuple de roseaux, un seul chêne : la France de la Ve République. Parlons démocratie représentative, démocratie participative : nous sommes en Suisse. Parlons démocratie autoritaire : nous sommes chez nous.
De ce constat peuvent découler deux hypothèses opposées, selon que l’on considère ce particularisme comme un atout précieux ou comme un mauvais présage.
Affaire d’institutions, assurément, mais qui ne voit que ce centralisme, cette verticalité, ce présidentialisme viennent de loin ? Qui peut prédire que cela changera bientôt, voire jamais ? Et qui peut affirmer que, quelque part, nous n’y trouvions pas notre compte ?


 

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Essais

Les Enfants du vide. Sortons de l’individualisme

Allary Éditions - 2018

« Nous sommes libres, sommes-nous pour autant heureux ? La sourde inquiétude qui nous tenaille vient de l’absence d’horizon collectif, de la crise des récits et des structures qui inscrivaient hier encore l’individu dans un tout. Nos parents ont déconstruits ces récits qui étaient des mythes aliénants, et ils ont eu raison. Mais nous ne pouvons nous contenter du rien qui prit leur place.
Si nos aînés sont arrivés au monde dans une société saturée de sens, nous sommes nés dans le vide. Leur mission était de briser des chaînes, la nôtre sera de retisser des liens.
La démocratie repose sur les droits de chacun, mais pas seulement. La tâche de notre génération sera de nous préoccuper de ce "pas seulement" qui fut trop longtemps délaissé : le droit du tout sur chacun. Car si nous ne le faisons pas, les forces les plus autoritaires le feront à notre place. » R.G.

Dans la lignée de Génération gueule de bois, Raphaël Glucksmann interroge le manque d’horizon collectif des générations élevées dans des sociétés individualistes.


 

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Essais

Le sacre de la terre

L’Aube - 2020

Pour se nourrir à dix milliards sur une seule petite Terre, se vêtir, se chauffer, se déplacer, produire de l’énergie renouvelable, capter le carbone, le travail de la terre redevient chaque jour un peu plus l’avenir de l’Homme, avec la science et l’art. Les objets et leur fabrication ne sont plus le tout de l’humain. Avec la révolution écologique et numérique, la mondialisation, il faut retrouver du sens, du local, du faire-pousser, du territoire, des lieux. Le bio et le local, le soleil et le vent, le sol et les forêts sont nos nouveaux futurs.

Re-naturons la ville et ré-humanisons la campagne, dit Edgar Morin.
Et pour entrer dans ce monde-là, il faut à la fois du conservatisme - celui de l’infiniment petit de millions de savoirs locaux - et du progrès des sciences, des arts et des techniques. Un ouvrage essentiel qui mêle monographies et grande Histoire, sociologie rurale et désirs urbains, combat climatique et besoin de sens. Signé de l’un des meilleurs spécialistes français des questions agricoles et territoriales, cette véritable somme est un plaidoyer pour une urgente révolution écologique.

Jean Viard est sociologue, directeur de recherche associé au Cevipof-CNRS. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont, aux éditions de l’Aube, Nouveau portrait de la France (2012) et Le triomphe d’une utopie (2015).

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Revue de presse :

 

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Romans

Le dictateur qui ne voulait pas mourir

Agullo - 2018

“Le troisième mandat avait été le plus terrible… Après ça, tout était allé de soi. Il était devenu dictateur.”

Que se passerait-il si le passé faisait irruption dans le présent, une irruption concrète, visible, palpable ? Telle est la question que rumine le Président, à la veille de lancer son grand défi à l’Histoire.
Enfermé dans une serre au verre sali par la pluie, d’où il dirige la Roumanie d’une main de fer depuis plus d’un demi-siècle, le dictateur s’apprête à offrir à son pays la gloire et une revanche éclatante sur le mépris du « monde civilisé ». Au passage, il compte bien acquérir l’immortalité. Pour éterniser son pouvoir et échapper à l’érosion du temps, il a fait construire en secret un prototype unique. Un portail entre présent et passé, capable de ramener
les morts. Et demain, il ramènera le plus illustre d’entre eux : un grand homme, un grand guerrier, un grand patriote… Michel le Brave.
Mais que fera Michel le Brave au xxie siècle ? Quand le leader d’une époque où empaler ses adversaires et leur arracher la langue étaient pratiques courantes débarque dans notre réalité, c’est la violence brute du Moyen-Âge qui déferle et provoque des réactions en chaîne pour le moins imprévisibles…

Dans ce roman énigmatique, Bogdan Teodorescu nous confronte à un passé qui, sortant brutalement des manuels d’histoire, vient rappeler que l’homme, avec son léger vernis de civilisation, reste un loup pour l’homme.

Traduit du roumain par Jean-Louis Courriol.

 

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Entretiens

À vrai dire… livre de l’après-pouvoir de Václav Havel

L’Aube - 2007

" Je suis un homme très peu sûr de moi, je suis presque névrosé, je panique, j’ai souvent peur - je doute de moi et comme si j’étais masochiste, je ne cesse de me culpabiliser et de me maudire.
En même temps, on me considère comme un homme sûr de lui et de ce qu’il a fait, admirablement équilibré, judicieux, persévérant, pragmatique et défendant avec réalisme ses opinions. Je suis rationnel, ordonné, discipliné, fiable, parfois même bureaucratiquement minutieux, et en même temps hypersensible, presque sentimental, attiré par ce qui est mystérieux, magique, illogique, inexplicable, grotesque et absurde ; bref tout ce qui est étranger à l’ordre ou qui le rend discutable.
" A vrai dire - livre-bilan qui vient en hommage, vingt ans après, à Interrogatoire à distance - est un patchwork construit à partir d’un entretien de Vàclav Havel avec Karel Hvizd’ala réalisé en 2006, d’extraits de ses carnets et du journal tenu pendant ses mandats de président. Vàclav Havel dessine ici le portrait de sa vie - et quelle vie !

Vàclav Havel, Tchèque né à Prague en 1936, dramaturge, dissident, prisonnier, président de la République : un livre hors du commun, paru à Prague en 2006 et bientôt traduit aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Espagne, en Italie..., pour un destin hors du commun.

 

DERNIER OUVRAGE

 

La traversée

Cinquante ans après Mai 68, Dany Cohn-Bendit et Romain Goupil ont décidé de traverser la France. Au gré de ce road-movie contemporain, ils explorent les territoires parfois déroutants de la République. Observer, écouter, débattre, découvrir l’état du pays, ses crises et ses espérances, ses héros ordinaires et ses fossoyeurs : deux vieux enfants de 68, deux vieux acteurs des événements se plongent dans la France d’aujourd’hui.