BATRAVILLE Dominique

Haïti

24 octobre 2016.
 
Dominique Batraville à Haïti 2012

Dominique Batraville est né à Port-au-Prince, le 20 février 1962. Il se déclare poète dès ses quinze ans sur les bancs du Petit Séminaire Collège St Martial. Après de brèves études à l’Université Libre de Bruxelles et à l’Université de Lille en France, il revient en Haïti le 10 juillet 1986 à la chute de Jean-Claude Duvalier.

L’écrivain observe de près ou de loin les espaces insulaires, les mondes créoles et méditerranéens. Le mode d’écriture de ce poète-marcheur est par endroits inextricablement lié au voyage, à l’utopie insulaire, à l’intention sacrée ou cosmique. D. Batraville a approché très tôt "le réalisme merveilleux" de Jacques Stephen Alexis, l’univers tourmenté de Kafka, les fables homériques de Juan Rulfo et les textes majeurs de la littérature créole caribéenne. En raison de son tempérament d’anarchiste discret, il investit l’absurde, la folie, le comique et la lumière parfois joyeuse de son île natale. Attaché au bouddhisme, au vodou et au calvinisme comme "matières premières" de ses récits, ce poète doublé d’acteur de cinéma, entend expérimenter encore sa "Poétique tempérée de la schizophrénie."

Lauréat en Martinique, en 1998, du Prix Sony Rupaire pour son conte Potre van nan sèvolan lakansyèl, il a été traduit en portugais par Jean Paul Mestas et en espagnol par Anna Kovack. Critique littéraire pour le quotidien Le Nouvelliste à partir de 1988, ses articles ont été publiés dans presque tous les journaux du pays, aux Antilles françaises, en Amérique du Nord et en Europe. Dominique a participé en tant que comédien à de nombreux films belges, français et suisses : Royal Bonbon de Charles Najman – Prix Jean Vigo 2002 – et L’évangile du cochon créole de Michelange Quay – sélectionné à Cannes en 2004.

Il publie en 2012 L’Archipel des hommes sans os, un recueil de 10 nouvelles inscrites dans l’imaginaire caribéen et créole. "Les personnages des différents textes de ce livre évoluent dans un monde qui rappelle à la fois le réalisme merveilleux de Jacques Stephen Alexis et le rythme tourmenté des récits de Julio Cortázar. L’auteur cerne avec force le tragique post-séisme haïtien, le grand rire créole et l’absurde du quotidien insulaire."

Haïti pendant et après le tremblement de terre est à nouveau le décor de son dernier livre, L’Ange de charbon, qui conte les mésaventures de M’Badjo Baldini, décrit comme "nègre errant d’origine italienne", face à la catastrophe. Une extravagante fable vodou dans sa langue inspirée, convoquant dans un même maelström dantesque et gargantuesque les esprits des morts et un fol érotisme où toutes les incarnations féminines, saintes larmoyantes, vierges et prostituées, dansent avec les joyeux squelettes de la dérision caribéenne. Si le personnage principal de l’Ange de charbon est Port-au-Prince, avec son peuple de martyrs et de rescapés, d’esprits et de morts-vivants, on comprend que c’est par le verbe que M’Badjo Baldini surmonte le Mardi des douleurs. Secoué d’un bout à l’autre d’un grand éclat de rire, ce chant d’un Maldoror noir, la tête dans les étoiles et le regard insolent, est comme une ultime réplique au séisme ravageur.


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Bibliographie :


Tout spécialement pour le site Étonnants Voyageurs, l’auteur nous a fait parvenir un texte inédit, à découvrir ici même.

L’arpenteur dans la ville des métamorphoses

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

L’ange de charbon

Zulma Editions - 2014

Tout commence à Port-au-Prince, par le tonnerre et l’engloutissement, le grand tremblement de gorge de « Monsieur Richter » avalant d’un coup des centaines de milliers de femmes, d’hommes, d’enfants et d’animaux. Face à ce nouvel esprit vaudou de la mort, M’Badjo Baldini – « nègre errant d’origine italienne » surnommé l’Ange de charbon – parvient à tenir la dragée haute à l’apocalypse, danse macabre où défilent Baron Samedi et Grande Brigitte, tous les saints du calendrier et tous les zombies des cimetières. Mais l’Ange de charbon est aussi une espèce singulière de traité sur le désir, un cantique des cantiques adressé à toutes les amantes sans discrimination, vierges verrouillées, reines, filles de joie, à commencer par Salomé dite Sassa, « si belle qu’elle valait trois Parisiennes ». Cette autobiographie d’un rescapé en tenue de prêtre vaudou, la tête dans les étoiles et le regard insolent, est secouée d’un bout à l’autre d’un grand éclat de rire, ultime réplique du séisme ravageur, ajoutant une dimension à ce chant d’un Maldoror noir qui se demande, après avoir crié « halte-là ! vagabond séisme ! », s’il ne devrait pas mettre sa peau à l’envers.