CREMISI Teresa

France

30 mars 2015.
 
© Gérard Uféras

Teresa Cremisi, née le 7 octobre 1945 à Alexandrie, est une éditrice et dirigeante d’entreprise italienne. Elle est Président-Directeur général de l’ensemble Flammarion regroupant les éditions Flammarion, J’ai lu, Casterman, Autrement et Fluide Glacial. Depuis l’acquisition de Flammarion par Madrigall en 2013, elle est l’une des dirigeantes de la holding Madrigall dirigée par Antoine Gallimard dont elle avait été le bras droit de 1989 à 2005.
Son premier roman, dont le titre annonce la couleur, Triomphante dresse le portrait d’une jeune femme rebelle ou frondeuse qui pensait que la vie est un art de la guerre et dont la seule patrie est la littérature et l’humour.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

La triomphante

Editions des Equateurs - 2015

La Triomphante. Il faut voir dans ce titre l’ironie de la narratrice qui raconte sa vie d’exilée entre l’Egypte, l’Italie et la France. Une femme qui aurait rêvé d’un destin d’homme – Achille, Hector, Bonaparte ou Lawrence d’Arabie – mais qui devra se contenter de l’Occident et de ses carrières en château de sable. Peut-on rencontrer la gloire, ce privilège trop masculin quand on est une femme née dans les années 1940 à Alexandrie et qu’on a rêvé devant la baie d’Aboukir des batailles navales napoléoniennes ?
Une famille composée d’une mère au passeport britannique et d’un père au passeport italien. La mère, remarquable crawleuse, artiste, sculptrice, légère comme un tanagra, plus à l’aise au volant d’une ambulance militaire que dans une cuisine. Le père, ex-gérant d’une société d’import-export, champion de régates et de golf. La fille, lectrice omnivore qui se passionne pour l’Iliade d’Homère mais qui restera toujours une étrangère. Les trois parlent le grec, l’arabe, le français, l’anglais, l’italien. Une famille cosmopolite qui a le sentiment qu’une civilisation finissante porte en soi quelque chose de désordonné, d’incohérent, d’élégant et que tout est provisoire pour elle et pour les autres. Surviennent les évènements du canal de Suez et la menace de la guerre.
Début de l’exil d’abord à Antibes avec ses étoiles de mer puis en Italie avec ses campari et Fellini, Rome, Milan. C’est le passage d’une ligne, d’une « ligne d’ombre » aurait dit Conrad. L’horizon se rétrécit. Il faut apprivoiser les effondrements. Extension du domaine du désastre. On se montre souple, on s’adapte. On apprend l’art de la dissimulation. Qu’est ce que l’amour quand on se rêvait général de brigade ? Un arrangement petit bourgeois avec la mort. L’exilée à perpétuité grandit, devient journaliste, directrice d’imprimerie, patronne d’un groupe industriel : des aventures plutôt que la nostalgie, ce poison. Heureusement, il y a les bains de mer, les cheveux mouillés et la fantaisie. La narratrice finit par débarquer à Paris et se confronte à sa langue maternelle : le français. Dans ses valises, son amoureux, Giacomo. Et si on se mariait ? Mais il faut un acte de naissance ! Le fameux état-civil ! Mais qui est le père ? Et la mère avant de mourir a brûlé tous les papiers. Tout se réveille. Tout se révèle. La quête d’une nationalité, d’une identité devient aussi éprouvante que la quête du Graal pour les chevaliers surtout quand on se confronte au fantôme de la honte.
Ce premier roman c’est d’abord un univers d’écrivain, une imagination portuaire, des rêves de bateaux. Et ce terrible sentiment d’exil que rien n’apaise, ni baiser, ni caresse. C’est une saga familiale et méditerranéenne, le portrait d’une femme plus que rebelle ou frondeuse qui pensait que la vie est un art de la guerre. La Triomphante c’est le portrait d’une étrangère dont la seule patrie est la littérature et l’humour. La rencontre de l’esprit anglais et de l’élégance italienne. Et une déclaration d’amour à la langue française.