GÜNDAY Hakan

Turquie

7 mars 2024.

Cet écrivain turc bâtit une œuvre romanesque engagée, usant de la puissance des mots et de la fiction pour dénoncer les injustices du monde réel : le tourisme de masse dans Topaz (Galaade, 2016), l’immigration dans Encore (Galaade, 2016), la guerre dans Ziyan (Galaade, 2014)... Celui que l’on surnomme “l’enfant terrible” des lettres turques pour la lucidité tranchante de sa plume, livre cette année un nouveau roman satirique vertigineux, Zamir (Gallimard, 2024). À travers le récit poignant de son jeune héros, Hakan Günday met à feu le business de la charité et lève le voile sur la corruption et l’hypocrisie des organisations humanitaires occidentales.

 

Figure majeure de la scène littéraire turque, Hakan Günday a découvert la littérature avec Louis-Ferdinand Céline ; une influence qui ne l’a plus jamais quitté. Né à Rhodes en 1976, il vit à Istanbul. Francophone, il suit son père diplomate à Bruxelles et dans nombre de pays européens. Après des études littéraires à l’université Haccetepe d’Ankara, il poursuit son cursus en sciences politiques à l’université libre de Bruxelles et à l’université d’Ankara. C’est alors qu’il commence à écrire.

D’un extrême à l’autre, son septième roman, est le premier à être traduit en français. Prix du meilleur roman de l’année 2011 en Turquie, D’un extrême à l’autre critique les crispations identitaires sous toutes leurs formes et dynamite les reliquats de l’orientalisme. Un grand roman insolent, un cri dans la nuit de la part de « l’enfant terrible » de la littérature turque.

Il est aussi l’auteur d’une pièce de théâtre écrite pour la compagnie du comédien Murat Daltaban. Par ailleurs son roman Piç, qui signifie littéralement « bâtard », est en cours d’adaptation cinématographique.

Son roman historique Ziyan, paru initialement en 2009, sort en France en 2014 aux éditions Galaade. Hakan Günday y met en scène son arrière-grand-oncle, qui fut exécuté en 1926 pour avoir tenté d’assassiner le président Mustafa Kemal. Fasciné par cette histoire, l’auteur imagine la jeunesse de son aïeul, sa découverte de l’Allemagne et son rôle dans le mouvement de libération de la Turquie. Günday signe ici un récit antimilitariste fort.

La consécration opère à la fin de l’année 2015 lorsque son tout dernier roman, Encore, reçoit le Prix Médicis étranger. À travers ce récit poignant et terrifiant, ancré dans notre réalité politique et sociale, l’auteur décrit la vie d’un jeune passeur turc, à la fois tortionnaire et victime, pris dans ce drame humain orchestrant l’exploitation des plus faibles, ces exilés anonymes qui se perdent et s’enlisent jusque dans la mort. Aujourd’hui, Hakan Günday se fait la voix de toute une génération, et devient par là même représentant des jeunes écrivains contemporains turcs de grand talent.


Bibliographie :

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Zamir

Gallimard - 2024

Zamir a six jours lorsqu’une bombe explose à al-Aman, un camp de réfugiés à la frontière turco-syrienne où sa mère l’a abandonné. Il survit, grâce à l’acharnement d’un chirurgien, mais reste défiguré. Élevé par All for All, une organisation humanitaire internationale, il devient un symbole, une image idéale pour collecter des fonds. Jeune adulte, il s’en émancipe pour rejoindre la Fondation pour la Première Paix mondiale et investir un poste clé de négociateur de l’ombre. Partout où un conflit armé est sur le point d’éclater, Zamir se précipite, l’empêche. Il rencontre des ministres, des dictateurs, des terroristes, ne recule devant rien. Pour les forcer à négocier, il les trompe, les fait chanter. Il n’a qu’un seul mot d’ordre : la paix avant tout, quel qu’en soit le prix.
D’une plume alerte et franche, Hakan Günday lève le voile sur la corruption et l’hypocrisie qui se cachent derrière la charité des organisations humanitaires, le cynisme des individus, la façon dont l’Occident lave sa conscience. Dans un monde alternatif qui a tout en commun avec le nôtre, il tire les fils de problématiques contemporaines pour bâtir une fiction palpitante autour d’un personnage inoubliable.

Traduit du turc par Sylvain Cavailles