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PANH Rithy

France - Cambodge

L’élimination (Grasset, 2012), Duch, le Maître des forges de l’enfer (2011)

« Je n’aime pas le mot traumatisme qu’on ne cesse d’utiliser. Aujourd’hui, chaque individu, chaque famille a son traumatisme, petit ou grand. Dans mon cas, c’est un chagrin sans fin ; images ineffaçable, gestes impossibles, silences qui me poursuivent. » Rithy Panh (L’élimination)

"La fin de Primo Levi m’effraie." confesse le documentariste Rithy Panh, réalisateur de S21, la machine de mort Khmère rouge, primé par la Scam en 2006 pour l’ensemble de son œuvre.

Comme l’auteur de Si c’est un homme, qui se donna la mort en 1987, Rithy Panh est le survivant d’un génocide : celui des Khmers rouges, qui décima entre 1975 et 1979 un quart de la population cambodgienne. Parmi les millions de victimes se trouvaient tous ses proches, ses parents, dont les visages l’accompagnent depuis comme des talismans.

C’est pour eux sans doute, et pour conjurer le vertige qu’inspirent les souvenirs du cauchemar, que le cinéaste explore inlassablement la tragédie de son pays. « Je veux comprendre, expliquer, me souvenir - dans cet ordre précisément. »

Né en 1964 à Phnom Penh d’un père haut fonctionnaire francophone, Rithy Panh voit à l’arrivée des Khmers rouges sa famille dispersée sur les chantiers de rééducation et rapidement décimée par le travail et la faim. Dans la typologie sommaire de l’Angkar, ils appartiennent au « nouveau peuple » : les bourgeois, les inutiles, ceux « qui n’apportent rien d’autre que leur ventre plein de merde et leur vessie remplie de pisse ».

Lui-même interné dans les camps khmers à l’âge de 11 ans, il survit quatre ans au travail épuisant sur les digues, dans les rizières, saoulé par les slogans délirants de l’Angkar, errant dans les mouroirs, sur les routes, parmi les morts et les vivants terrorisés. En 1979, il parvient à s’échapper et arrive au camp de réfugiés de Mairut, en Thaïlande, avant de s’envoler vers la France. Recueilli par des membres de sa famille, il apprend alors la menuiserie pour s’en sortir, tout en se passionnant pour le cinéma. Il finit par entrer à l’IDHEC en 1985 et se spécialise dans le documentaire.

Passeur de mémoire, il montre les horreurs qui ont eu lieu dans son pays dans « « Site 2 » (1989), « La Terre des âmes errantes » (1999), « Les Gens de la rizière », présenté en compétition officielle à Cannes en 1994, et « Un soir après la guerre » en compétition dans la section "Un Certain Regard" en 1998. En 2003, le documentaire « S21, La Machine khmère rouge », présenté et primé dans de nombreux festivals, frappe les consciences : confrontant les trois seuls rescapés du centre de torture S21 à leurs anciens bourreaux, aujourd’hui en liberté, le film est une charge contre Duch, directeur de la prison et premier responsable khmer rouge à être poursuivi par la justice internationale.

Dans son ambition de comprendre la folle machine à tuer, Rithy Panh se confronte directement dans son dernier film à Duch. Pas pour lui donner une tribune, mais pour montrer ce que fut l’organisation qu’il incarne, l’Angkar. Produit de milliers d’entretiens, ce film d’une rare puissance constitue un témoignage probablement unique dans les annales de l’Histoire : face à la caméra, l’un des responsables d’un crime de masse accepte de s’exprimer, très longuement, sur sa responsabilité.

Après avoir longuement côtoyé le bourreau, au point de vaciller, Rithy Panh a ressenti le besoin de revenir sur son histoire personnelle, pour donner une place à ses proches.
Puisant dans les souvenirs de l’enfant qu’il fut, confronté à la démence sanglante des Khmers rouges, il signe avec le romancier Christophe Bataille un livre sobre et bouleversant, L’élimination.


En savoir plus :


Interview avec Rithy Panh au FIFDH Genève 2012 par fifdhgeneve


Filmographie

  • Duch, le Maître des forges de l’enfer (2011)
  • Un barrage contre le Pacifique (2008)
  • Le papier ne peut pas envelopper la braise (CDP, 2006)
  • Les Artistes du théâtre brûlé (2005)
  • Les Gens d’Angkor (2003)
  • S21, la machine de mort Khmère rouge (2002)
  • Que la barque se brise, que la jonque s’entrouvre (2000)
  • La Terre des âmes errantes (1999)
  • Van Chan, une danseuse cambodgienne (1998)
  • 10 films contre 110 000 000 de mines (1997)
  • Un soir après la guerre (1997)
  • Bophana, une tragédie cambodgienne (1996)
  • Les Gens de la rizière (Neak Sre) (1994)
  • Site 2 - Aux abords des frontières (1989)

Présentation de Duch, le Maître des forges de l’enfer


Revue de presse :

« Le génie du film est là. Dans cette retenue de la colère ou du jugement, dans le refus de désigner a priori le bourreau comme un monstre, dans l’attention portée à sa parole, dans la reconnaissance de son humanité, et dans la confiance en la puissance du cinéma pour établir, sinon la vérité absolue, du moins celle de l’assassin. » Jacques Mandelbaum, Le Monde

« Fruit d’une fréquentation assidue du bourreau, Duch, le maître des forges de l’enfer oppose à la barbarie dont il fit preuve - et dont sa dialectique garde la trace - la rigueur et l’honnêté d’un processus cinématographique qui le reconnaît en tant qu’homme, jusqu’à se clore sur des plans qui le montrent dans sa cellule, s’alimentant et faisant de la gymnastique. Outre ce qu’il nous dit de l’idéologie khmère rouge et du fanatisme de Duch, ce précieux documentaire (...) constitue en lui-même une victoire de l’éthique et de l’humanité sur la barbarie. » François Ekchajzer, Télérama


Bibliographie :

  • L’élimination avec Christophe Bataille (Grasset, 2012)

Présentation de L’élimination

couverture "A douze ans, je perds toute ma famille en quelques semaines. Mon grand frère, parti seul à pied vers notre maison de Phnom Penh. Mon beau-frère médecin, exécuté au bord de la route. Mon père, qui décide de ne plus s’alimenter. Ma mère, qui s’allonge à l’hôpital de Mong, dans le lit où vient de mourir une de ses filles. Mes nièces et mes neveux. Tous emportés par la cruauté et la folie khmère rouge. J’étais sans famille. J’étais sans nom. J’étais sans visage. Ainsi je suis resté vivant, car je n’étais plus rien."

Trente ans après la fin du régime de Pol Pot, qui fit 1.7 millions de morts, l’enfant est devenu un cinéaste réputé. Il décide de questionner un des grands responsables de ce génocide : Duch, qui n’est ni un homme banal ni un démon, mais un organisateur éduqué, un bourreau qui parle, oublie, ment, explique, travaille sa légende.

L’élimination est le récit de cette confrontation hors du commun. Un grand livre sur notre histoire, sur la question du mal, dans la lignée de Si c’est un homme de Primo Levi, et de La nuit d’Elie Wiesel.


Revue de presse :

"Trente-cinq ans plus tard, le talent du narrateur resurgit dans un livre magnifique, écrit en compagnie du romancier Christophe Bataille, avec d’autres histoires, dans lesquelles les fantômes, les démons et les sorciers sortent de l’univers des Khmers rouges. (...) Des histoires peuplées de véritables vampires qui vident leurs victimes de leur sang, d’ogres qui brûlent des enfants coupables d’être nés de parents bourgeois." Jean Hatzfeld, Le Monde

Cambodge : La terre des âmes errantes

Cambodge : La terre des âmes errantes

(Rithy Panh, La Sept ARTE, INA, 1999, 100’) -

En 1999, les travaux de pose du premier câble de fibres optiques d’Asie du Sud-Est ont traversé le Cambodge. Ils impliquent le creusement d’une tranchée d’un mètre de profondeur de la frontière thaïlandaise à la frontière vietnamienne, pour y enfouir le câble à peine plus gros que le pouce. C’est là l’occasion pour de nombreux Cambodgiens – paysans pauvres, soldats démobilisés, familles sans ressources – de trouver du travail.
La tranchée rencontre les mines et la présence obsédante des millions de morts dont les âmes errent harcelant les survivants, faute de sépultures. Tout au long de son creusement à la pioche, à la houe, à la main, elle met en scène l’angoisse de pouvoir continuer à travailler tout en subissant quotidiennement la violence économique.
Le film suit sa progression, s’attachant à quelques personnages centraux qui symbolisent les difficultés et les contradictions que doit surmonter ce pays, dans la nécessité de survivre et la volonté de renouer avec une culture ancestrale laminée, elle aussi, par les années de guerre.
Le réalisateur Rithy Panh a suivi ces familles venues chercher de quoi survivre dans un pays encore dévasté.
En présence du réalisateur.


Duch, le maître des forges de l'enfer

Duch, le maître des forges de l’enfer

Rithy Panh (Les acacias / 2012 / 103’) -


Entre 1975 et 1979, le régime Khmer rouge a causé la mort d’un quart de la population du Cambodge. Duch, membre de l’Angkar, « l’Organisation » dirigeait à l’époque le centre de torture S21 où périrent, au moins 12.380 personnes. Le maître de la “machine de mort” Khmère rouge a accepté de se dévoiler face à la camera de Rithy Panh. Le film met en perspective la parole nue du bourreau avec des images d’archives et des témoignages de survivants. Un documentaire implacable sur les rouages d’un système de destruction de l’humain.


La bande annonce de Duch, le maître des forges de l’enfer



Le papier ne peut pas envelopper la braise

Le papier ne peut pas envelopper la braise

(Rithy Panh, CDP, 2006, 86’) -

Elles sont des dizaines, au centre de Phnom-Penh, à travailler sous la surveillance d’un placeur chargé de rabattre les clients. Très jeunes femmes prostituées dès l’adolescence, venues de la campagne vendre leur virginité et ainsi nourrir leur famille. De ces confidences s’élève un chant tragique.

Ce film a reçu le Fipa d’or en 2007

Le papier ne peut pas envelopper la braise
D.R.

Les gens d'Angkor

Les gens d’Angkor

(Rithy Panh, Ina / Arte France, Cambodge, 2002, 94’) -

La vie quotidienne des habitants d’Angkor, parmi les temples millénaires, est bien moins connue que le site. Malgré les décennies de guerre et dans l’ombre de sa récente vocation touristique, Angkor est bruissant de vie. Si les habitants d’Angkor sont en butte aux contraintes d’un développement touristique dévorant qui menace l’équilibre de leur culture, ils sont les gardiens de sa mémoire et de sa continuité vivante. Ce sont eux qui vont nous raconter la vie quotidienne au milieu des temples prestigieux.

8th Jihlava International Documentary Film Festival, République Tchèque
Il Silenzioso Richiamo della Tierra, Palerme
Festival Dei Popoli, Italie
14è rencontres du film documentaire Traces de vies, Vic le Comte
8th BeloHorizonte’s documentary and Ethnographic Film Festival, Brésil
International Documentary Film Festival of Navarra, Punto de Vista, Espagne
Semarang International Film Festival
San Francisco International Asian American Film Festival
29th Hong Kong International Film Festival, Chine
18th Singapore International Film Festival, Singapour
19th Pärnu International Film Festival, Estonie


S21, la machine de mort khmère rouge

S21, la machine de mort khmère rouge

(Rithy Panh, INA / Arte France / COSIP / PROCIREP / YLE / RTSI, 1991, 100’) -
Affiche du film

Ce film fait suite au travail de mémoire cinématographique entrepris par Rithy Panh sur l’histoire du génocide cambodgien qui traversa sa propre vie. En réactivant des mémoires jusque là confisquées, ce sont tous les mécanismes quotidiens de l’horreur qu’il fait peu à peu émerger.

  • Grand Prix Spécial du Jury, Doclisboa 2004 II Lisbon International Documentary Film Festival, Portugal
  • Human Rights Documentary Film Forum, Budapest
  • 4th Human Rights in Film IFF, Pologne
  • International Human Rights Film Festival Programme, Ukraine

L’élimination

Grasset - 2012

L’élimination Trente ans après la fin du régime de Pol Pot, qui fit 1,7 million de morts, l’enfant est devenu un cinéaste réputé. Il décide de questionner un des grands responsables de ce génocide : Duch, qui n’est ni un homme banal ni un démon, mais un organisateur éduqué, un bourreau qui parle, oublie, ment, explique, travaille à sa légende. L’élimination est le récit de cette confrontation hors du commun. Un grand livre sur notre histoire, sur la question du mal, dans la lignée de Si c’est un homme de Primo Levi, et de La nuit d’Elfe Wiesel. Film : Duch, le Maître des forges de l’enfer (2011)

Dans la tourmente de l’histoire

Les Cafés littéraires en vidéo
Saint-Malo 2012

Cambodge, au bout l’enfer

Avec Rithy Panh et Tian - Saint-Malo 2012

Une rencontre avec Rithy Panh et Tian, animée par Kerenn Elkaim


Nouvel article

Avec Rithy Panh - Saint-Malo 2012

Une rencontre autour du réalisateur et écrivain cambodgien Rithy Panh, animée par Stéphanie Valloatto.