Bibliothèque

La Sainte Famille

La Table Ronde

« Je suis né au début de la dernière guerre, au cours d’un hiver terriblement froid. Ma mère me portait déjà en elle alors qu’elle fuyait sur les routes de France avec les hordes de la débâcle. Le mot qui revenait sans cesse dans ses récits était "la peur", une peur qui vous prend dans le ventre et vous fait fuir absurdement n’importe où. Dès que la France eut capitulé, mon père a décidé de rentrer. C’est ainsi qu’au lieu de naître sous le chaud soleil du Midi, j’ai senti sur ma peau d’enfant nouveau-né le froid mordant de l’hiver du Nord. Ma mère avait déjà trois enfants. Nous subîmes, mes frères et moi, les maladies d’enfant mais chacun de notre façon. Moi, je vomissais sans vergogne et salissais mon lit. Mais ma mère me redonnait aussitôt un biberon que je buvais avec grand appétit, ce qui m’empêcha de m’affaiblir et hâta ma guérison. Cependant, j’avais également ma façon propre d’appréhender l’existence et, d’aussi loin que je me souvienne, je la ressentais comme quelque chose d’inopportun qu’on m’avait imposé sans me demander mon avis. Je ne crois pas que cela soit très original, mais c’était ainsi. »

América : suivi de En Orient

Gallimard - 2012

William Cliff (né à Gembloux en 1940) est l’un des poètes les plus singuliers de l’actuel champ poétique belge. Usant d’une forme ostensiblement classique, il réussit, par les situations et les thèmes abordés, à créer de parfaits objets de scandale. Il a le verbe violent et voyou, l’inspiration à l’affût des désirs quotidiens, en tous lieux et en tous pays. Les voyages, avec leur part d’errances et de rencontres imprévues, donnent le mouvement et le cadre de ce livre double qui vagabonde et passe du continent américain aux contrées d’Asie. Ainsi America est composé de poèmes inspirés par deux longs séjours en Amérique du Sud et deux voyages aux États-Unis. « Tavalera » décrit en alexandrins la traversée vers l’Amérique du Sud à bord d’un cargo allemand qui porte ce nom. Puis viennent « Montevideo » et « Cone Sud ». William Cliff évoque les plages, les bidonvilles, ses brèves rencontres homosexuelles. Dans les deux dernières parties, « Philadelphie » et « Cape Cod », il raconte les étapes de son périple aux États-Unis. Dans cette déambulation de poète voyageur, William Cliff est à son meilleur. Le Nouveau Monde lui inspire des images aussi désolées que l’Ancien. Il est désespéré, grinçant, funèbre et malgré tout drôle. Dès les premières pages, on reconnaît un ton, une allure, une désinvolture révoltée qui n’appartiennent qu’à celui qui avoue pratiquer l’alexandrin « comme on gratte dans son nez pour s’occuper ». William Cliff : un dynamiteur de pensées molles et de comportements convenus, un maître du langage impeccablement dévoyé.


U.S.A. 1976

La Table Ronde - 2010

Un jeune homme prend l’avion pour la première fois de sa vie et se lance dans un « audacieux voyage », sans tabous ni clichés. Au gré de son humeur et de ses rencontres, il arpente New York, Boston, San Francisco... Les grands espaces, les marches éreintantes et puis aussi une fascination, un sourire, une lumière, qui rafraîchissent et donnent de l’élan...


Epopées

La Table Ronde - 2008

« j’ai pris un bain j’ai taillé ma tignasse j’ai coupé ma barbe avec un rasoir j’ai regardé dans la glace ma face et vu qu’elle n’était pas belle à voir alors quittant le carré du miroir j’ai levé le regard vers les nuages et qu’ai-je vu dans cette lente nage de vapeurs finement illuminées ? nothing nothing sauf qu’en moi le langage continuait sa démarche obstinée » William Cliff.


Immense Existence

Gallimard - 2007

« Dans Immense existence, l’électricité propre à William Cliff produit de nouveau ce sourd rayonnement de lampe de poche qui se promène dans les recoins obscurs ou négligés des sentiments et de la vie. Elle les éclaire furtivement, comme pour ne pas effrayer leurs ombres, mais leur donne un relief en creux, d’une vérité troublante. » Jacques Réda.


Le Pain quotidien

La Table Ronde - 2006

« et puisqu’à présent la page est tournée tant pis pour tout ce que l’on a perdu grâce à quoi plus léger dans la journée on marche à travers la ville rendue à notre errance de pauvre qui dure et du spectacle de la rue profite la voilà dessinée sur cette orbite qui n’en finit pas d’ourler les saisons et qu’il faudra brusquement que l’on quitte avant qu’on ait achevé sa chanson » Bruxelles, 4 juin 2003.


L’Adolescent

Le Rocher - 2005

« Mon idée ! mon idée ! » s’écriait l’Adolescent dans le roman de Dostoïevski. C’est ce voeu intense, secrètement entretenu par l’adolescent que l’auteur a voulu poursuivre et retrouver. Il y a la solitude du coeur, et il y a un espoir immense porté vers une chose confuse et désirable qui s’appelle l’avenir, cet avenir personnel que l’on veut obtenir pour enfin surmonter les inquiétudes et les échecs qui sont le pain quotidien de cet âge apparemment si beau. Tout le monde le trouve charmant, ce séduisant garçon, mais personne ne soupçonne les affres de sa sensibilité trop vive ni les déconvenues que son rêve rencontre à chaque pas. N’empêche, son éclat, sa lumière lui viennent de sa merveilleuse innocence, de son angoisse désarmante qui nourrissent et magnifient cet éclat, cette lumière...


La Dodge

Le Rocher - 2004

Qui parle ? Cet homme, cette voix sourde et puissante, qui s’exprime tout au long de cette narration, a vu la réalité du terroir, des bêtes, des gens. Mais il connaît bien ce monde et son horizon étriqué pour ne pas se laisser enlever par le grand large. Peu à peu, on le voit prendre goût aux grandes choses, il s’y lancera à corps perdu et tiendra bon à travers mainte vicissitudes. Finalement, il aura donné une magnifique ampleur à son existence et sa Dodge n’est là que comme un indice quasiment négligeable, un succédané de son bonheur. Mais diable ! Un tel engin quand même


Passavant la Rochère

Virgile - 2004

" le lendemain me voilà dans les bois (marchant pour me rendre à la verrerie) à Selles des hommes disent que la traversée de ces bois est impossible parce que les pluies furent excessives mais je m’en fous je continue ma marche malgré l’eau ruisselante qui débarque un peu abondamment dans les ornières le terrain monte l’eau est moins tenace je marche constamment vers La Rochère.


Le Passager

Le Rocher - 2003

Le passager, fasciné par ce qui se passe à nos portes et dont personne ne semble se soucier, entreprend de voir par lui-même les choses depuis l’intérieur des terres de la défunte République démocratique allemande aux prises avec la nouvelle " unification sacrée " et nous en rend compte pas à pas. William Cliff, poète qui tout au long de son œuvre a arpenté et interrogé inlassablement le monde, nous donne ici, après La Sainte Famille, son deuxième roman, issu d’une longue errance au cœur des anciennes terres de l’Est. " Un train pour Rostock était à quai. La machine, de fabrication soviétique, vrombissait sourdement. L’on siffla le départ. Le moteur à mazout se mit à gronder à toute force et entraîna le convoi vers l’ancienne Allemagne de l’Est. " J’essayais de voir l’endroit où le train franchit l’ancienne frontière. N’était-ce pas ici ? Où tout à coup le paysage n’offre plus rien qu’une grande lande ? Ici sans doute se dressaient les fameux miradors. Et ces longs poteaux de bois, tous les mêmes, avec une laide lampe à leur sommet couverte d’un disque noir, oui, je les reconnais, pour les avoir déjà vus jadis en allant à Berlin. Nous roulons sur le réseau de la ci-devant Deutsche Reichsbahn, on le remarque aux gares, aux signaux, à toute la pauvreté, toute la vétusté, la laideur du matériel et des maisons. Le paysage lui-même semble imprégné de quelque chose de triste, de négligé, d’irrémédiable. " "Les croupes lacustres de la Baltique", lit-on sur les atlas. En effet, nous n’avons plus ici la grande plaine alluvionnaire de la mer du Nord mais des renflements couverts de bouleaux et d’herbes sauvages ; la terre, dans ses commotions, quand elle fit la fosse qui s’appelle aujourd’hui la mer Baltique, a laissé des restes de ses mouvements : ces croupes, et aussi ces lacs nombreux, qui donnent quelque variété au paysage. " Le train s’arrête dans des villes aux noms tout à fait inconnus, villes qui, vues du train, font mal au cœur, et dont on a peine à imaginer quelle vie a été la leur pendant tout ce long temps, les longues quarante années de ce régime. "


Ecrasez-le précédé d’Homo Sum

Gallimard - 2002

« Il n’est pas du tout caressant, séducteur, enjôlant, William Cliff. Ce Leopardi du trottoir, cet Ecclésiaste mal élevé, plein de mots crus, de mots-crasse. Tout ça dit dans la versification la plus pointilleuse, maniaquement régulière, en vers bien sages et mesurés, comme si François Coppée s’était donné pour thème : une soirée de masturbation au coin d’un feu triste, l’odeur forte d’une fille, la lame du rasoir sur la peau le matin, un garçon en blue-jean qui attend le bus, et le néant burlesque, qui manque de drapé et manque de manières. » Claude Roy.


Adieu patries

Le Rocher - 2001

La Sainte Famille

La Table Ronde - 2001

« Je suis né au début de la dernière guerre, au cours d’un hiver terriblement froid. Ma mère me portait déjà en elle alors qu’elle fuyait sur les routes de France avec les hordes de la débâcle. Le mot qui revenait sans cesse dans ses récits était "la peur", une peur qui vous prend dans le ventre et vous fait fuir absurdement n’importe où. Dès que la France eut capitulé, mon père a décidé de rentrer. C’est ainsi qu’au lieu de naître sous le chaud soleil du Midi, j’ai senti sur ma peau d’enfant nouveau-né le froid mordant de l’hiver du Nord. Ma mère avait déjà trois enfants. Nous subîmes, mes frères et moi, les maladies d’enfant mais chacun de notre façon. Moi, je vomissais sans vergogne et salissais mon lit. Mais ma mère me redonnait aussitôt un biberon que je buvais avec grand appétit, ce qui m’empêcha de m’affaiblir et hâta ma guérison. Cependant, j’avais également ma façon propre d’appréhender l’existence et, d’aussi loin que je me souvienne, je la ressentais comme quelque chose d’inopportun qu’on m’avait imposé sans me demander mon avis. Je ne crois pas que cela soit très original, mais c’était ainsi. »


L’Etat belge

La Table Ronde - 2001

Journal d’un Innocent

Gallimard - 1996

Le gel parlons-en triture mon être en cet hiver rigoureux où j’écris au bruit constant d’un vieux calorifère près duquel je suis comme une souris seule aux grands yeux écarquillés la nuit pour épier les dangers qui la guettent mes membres tremblent ma peau se craquette mon nez s’enrhume mes dents me font mal j’ai peur que dans la rue on ne se jette sur moi pour la proie d’un peu de métal (Extrait d’Hiver 1992.)


Autobiographie

La Différence - 1993

Dans ’Autobiographie’, William Cliff raconte, sous forme de sonnet, sa vie, de l’enfance à Gembloux aux années erratiques de jeunesse. Le lecteur se trouve pris dans un flux où la détresse, l’homosexualité, la hargne, le dégoût de vivre et les images d’un bonheur fuyant composent la fresque narrative.


Fête Nationale

Gallimard - 1992

Le Pain austral

Tétras Lyre - 1990

Conrad Detrez

Le Dilettante - 1990

Dire en dix pieds, dix vers, et cela par cent fois, ce que furent la vie puis la mort, ce qu’est le souvenir d’un ami disparu : c’est ce qu’accomplit le poète William Cliff. Le monde sans Conrad n’est plus qu’une arène enneigée, un sol froid, vidé de sa violence lourde et chaleureuse. Pour le dire, un modèle, un guide : la Délie de Maurice Scève. Paroles, scènes, attitudes ; remembrance que rompt parfois le grain plus dur qu’une cocasserie, d’une prière, ou l’aveu du poète peinant à clore son vers... Conrad Detrez, ou le long thrène du "frère abîmé dans la poussière".


En Orient

Gallimard - 1986

America

Gallimard - 1983

America est composé de poèmes inspirés à William Cliff par deux longs séjours en Amérique du Sud et deux voyages aux États-Unis. Tavalera décrit en alexandrins la traversée vers l’Amérique du Sud à bord d’un cargo allemand qui porte ce nom. Puis viennent Montevideo et Cône Sud. William Cliff évoque les plages, les bidonvilles, ses brèves aventures homosexuelles. Dans les deux dernières parties, Philadelphie et Cape Cod, il raconte les étapes de son vagabondage aux États-Unis. Dans ce tourisme de poète vagabond, on retrouve William Cliff à son meilleur. Le Nouveau Monde lui inspire des images aussi désolées que l’Ancien. Il est désespéré, grinçant, funèbre et malgré tout drôle. Dès les premières pages, on reconnaît ce poète qui ne ressemble à aucun autre.


Marcher au charbon

Gallimard - 1978

On retrouve dans ce nouveau livre le monde révélé par Homo Sum, paru dans les Cahiers de poésie en 1973 et par Écrasez-le, paru en 1974. C’est la même errance sarcastique, l’obsession d’une homosexualité agressivement réaliste, le journal de bord d’un marginal qui ne se donne d’autre règle que celle de versifier en alexandrins. Cet alliage d’un fonds très noir et scandaleux et d’une forme très rythmée et classique fait l’originalité de cette poésie et lui donne une force explosive. Un monde d’une tristesse absolue mis en musique sur un rythme moqueur de ritournelle. C’est une façon finalement pudique de dire son malheur, de faire entendre sa plainte.


Ecrasez-le

Gallimard - 1976

Avec une force exceptionnelle, qui vient traverser le poème, provoquant raillerie, cris, aveux loin de toute complaisance, William Cliff nous entraîne dans son enfer homosexuel, dans sa cité lugubre, souillée, luttant contre toute effusion lyrique à coups de profération coléreuse.


Homo sum

Gallimard - 1973

Retour à l’épopée

Avec Jacques Darras, William Cliff et Eric Sarner - Saint-Malo 2012

Avec Jacques Darras, William Cliff et Eric Sarner


La Belgique, laboratoire du futur ?

Avec Julos Beaucarne, Fanchon Daemers, Jean-Luc Debattice, Jean-Pierre Verheggen, David Van Reybrouck, Jacques De Decker et William Cliff - Saint-Malo 2012

Avec Julos Beaucarne, Fanchon Daemers, Jean-Luc Debattice, Jean-Pierre Verheggen, David Van Reybrouck, Jacques De Decker et William Cliff, animé par Catherine Pont-Humbert