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Les pieds sales

Seuil

Dans la nuit parisienne, Askia et Olia poursuivent des ombres. Le premier est un Télémaque obscur au volant d’un taxi lugubre sur les traces du père. Quant à elle, elle traque avec son appareil photo des figures d’hommes et de femmes sans patrie, des terriens aux pieds sales à force de courir le monde. Comme ces clandestins qui, chaque aube que font les dieux de l’exode, remontent du Sud de leur enfance vers le Nord des errances. De l’Afrique aux rivages européens de Santa Cruz de Ténérife… Des êtres en quête de pain, d’espoir. De terre aussi. Olia pourra-t-elle aider Askia dans sa désespérance ? Et si le dernier salut, le pays ultime au terme de leur périple c’était l’amour dans le regard de l’autre ? Pendant ce temps, les skinheads de la haine se tiennent prêts. A en finir avec celui qui reste l’étranger…

Explication de la nuit

Boréal - 2013

Ito Baraka va mourir. À Gatineau, loin du soleil, dans l’obscurité humide de ce minable appartement qu’il partage avec sa compagne, Kimi, autochtone et junkie. Mais, avant de mourir, il a ce livre à finir. Ce roman où il raconte des événements qui se déroulent dans un pays où le soleil brûle, brûle la peau, brûle le cerveau, brûle la rétine de ceux qu’on oblige à le regarder sans ciller. Dans un pays où brille également un autre soleil, celui d’un dictateur en proie à la peur. Et quand un dictateur a peur, il ratisse large. D’abord, il y a ces jeunes, à l’université, qui affichent leur liberté en montant Beckett sur des scènes de fortune et en distribuant des tracts où la parole de l’auteur de Fin de partie prend une résonnance insoupçonnée. Ensuite, il y a les vieux, qui sont, on le sait bien, devins, mages, charlatans et surtout ensorceleurs et mangeurs d’âmes, et qui, une fois la nuit venue, sur leur couche, ferment les yeux, ordonnent à leur esprit de quitter leur corps et partent vers des contrées lointaines, êtres étranges aux bras déployés au-dessus des cases endormies, leurs ailes de feu tendues dans le vent. La magie n’est-elle pas la plus dangereuse forme de sédition ? C’est ainsi que Ito, dans sa cellule, fera la connaissance de Koli Lem, l’aveugle qui ne se sépare jamais de ses livres. Au milieu de la nuit la plus noire, dans les paroles échangées, dans leur chair, ils seront l’un pour l’autre l’unique lumière. Dans ce quatrième roman, Edem Awumey propose une œuvre d’une force inouïe, qui explore impitoyablement cette obscurité que l’humanité porte en elle. 


Rose déluge

Seuil - 2012

Venu du golfe de Guinée et transitant par le Canada, le jeune Sambo transporte dans une boîte les « restes » de sa tante Rose (en fait, ses cheveux et ses ongles) que la défunte lui a demandé d’ensevelir à la Nouvelle-Orléans, terre de ses ancêtres. Rose était une vieille femme un peu givrée qui vivait à Lomé dans ses hallucinations et attendait en vain l’arrivée d’un bateau mythique, le Butterfly. Le roman commence à un arrêt d’autobus de la banlieue d’Ottawa, lorsque Sambo est abordé par Louise, une jeune Acadienne intriguée par sa précieuse boîte dont il hésite à révéler le contenu. En récits alternés, les deux jeunes gens se révéleront l’un à l’autre, aimantés par la similitude de leurs malheurs. Louise se rend à New York où elle veut entamer une carrière de danseuse. Elle est issue d’un viol : c’est cela qu’elle désire danser et mimer sur les trottoirs de Broadway. A la fin, après une longue scène d’amour d’une grande beauté, dans laquelle les caresses échangées font surgir les fantômes de chacun, Louise décide d’accompagner Sambo jusqu’au terme de son voyage, à la Nouvelle-Orléans.


Les pieds sales

Seuil - 2009

Dans la nuit parisienne, Askia et Olia poursuivent des ombres. Le premier est un Télémaque obscur au volant d’un taxi lugubre sur les traces du père. Quant à elle, elle traque avec son appareil photo des figures d’hommes et de femmes sans patrie, des terriens aux pieds sales à force de courir le monde. Comme ces clandestins qui, chaque aube que font les dieux de l’exode, remontent du Sud de leur enfance vers le Nord des errances. De l’Afrique aux rivages européens de Santa Cruz de Ténérife… Des êtres en quête de pain, d’espoir. De terre aussi. Olia pourra-t-elle aider Askia dans sa désespérance ? Et si le dernier salut, le pays ultime au terme de leur périple c’était l’amour dans le regard de l’autre ? Pendant ce temps, les skinheads de la haine se tiennent prêts. A en finir avec celui qui reste l’étranger…


Port-Melo

Gallimard - 2006

« La caisse aux gorilles traversa le cauchemar du Port, les rues fantômes, un vieillard et une petite fille se tenaient par la main, la petite fille en larmes sur les traces de la mère violée et découpée plus loin sur un trottoir. Le cauchemar du Port, une séance d’exécution publique en présence d’une foule silencieuse, la troupe qui charge son tir et le condamné qui commence son dernier gospel : Amazing Grace... À la place des vitrines éclatées de la rue Z, des rideaux blancs sur lesquels un passant, un type aussi fou que l’ami Manuel, écrivait : "Quand tu me tiens, Port-Mélo... Je perds le nord et la peau." J’ai à peine le temps de classer ces images, ranger dans un coin de la mémoire les pneus brûlés, les deux pendus qui gesticulent devant le musée et le croque-mort débordé. Parce qu’il avait du boulot, il avait des corps... » Sur une côte d’Afrique, une milice cruelle réprime la moindre manif, étouffe dans les gorges la moindre clameur. Manuel, traqué, marche « à contre-voie », il tient un précieux carnet des disparus que les autorités voudraient détruire. La mère Cori, sage vieille folle, raconte et attend. La jeune et si belle Joséphine s’offre en un clin d’étoile entre un flamboyant et un wharf rouillé... Une mosaïque de personnages et tout un peuple jouent leur vie dans une ville et un pays qui effacent l’homme et ses traces, qui met du blanc sur le viol des corps et des rêves. Ici, par la grâce d’une écriture lancinante et émouvante, l’Afrique nous tend le miroir d’un monde à notre image, qui se démembre sous ses masques riant et criant d’inhumaine humanité.