« Car la beauté existe là où le souffle / A une figure qu’on peut oublier ». Dans ces Miettes de Décembre, Ariane Dreyfus rassemble ces « figures » de la beauté que sont les visages passants et les prénoms changeants d’une femme, de sa petite fille, ó de toute femme et toute petite enfance peut-être ó et qu’un improbable récit nous dévoile et nous voile dans le même temps. Bribes d’histoire, instants de vie, enfances émiettées que la langue nous laisse entendre dans le mélange de ses voix possibles (celles des naïvetés et des émerveillements, des découvertes, des craintes et des blessures, celle de la vie tout simplement, de la mort aussi). Qu’on ne s’y trompe pas, il n’y a aucune posture facile dans ces poèmes, mais bien plutôt la force d’une voix à la fois douce, tendre, tout imprégnée d’une vie en perpétuel mouvement et d’une grammaire poétique qui bute sur les pierres de doute parsemées sur le chemin où mère et petite fille marchent ensemble. Alliant morceaux de dialogues, récits inachevés, questions (souvent sans réponse), aphorismes et vers, les poèmes d’Ariane Dreyfus ont cette capacité rare de condenser l’éveil que produit chaque moment de bonheur comme volé au temps qui passe et la gravité des scènes que l’existence nous réserve. Ces scènes, ces moments, qui sont, peut-être, parfois les mêmes, nous disent « où l’âme respire dans un corps ». « Les lumières s’allument, pas les visages. / Mais les visages avancent. Eux. »