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Une disparition

Denoël

Une disparition « Il est des jours où l’absence de mon père me pèse comme un enfant assis sur ma poitrine. Il en est d’autres où je me souviens à peine des traits exacts de son visage, jusqu’à devoir sortir de leur vieille enveloppe les photographies rangées dans le tiroir de ma table de nuit. Jamais, depuis sa soudaine et mystérieuse disparition, je n’ai cessé de le chercher, de scruter les endroits les plus improbables. Toute chose, tout être, l’existence elle-même, sont devenus évocations, possibilités d’une ressemblance. Peutêtre est-ce là ce qu’on entend par ce mot bref et aujourd’hui presque archaïque : élégie. » Une disparition se noue autour d’une intrigue politique : l’enlèvement de Kamal Pasha el-Alfi, ancien ministre sous la monarchie égyptienne et dissident politique depuis la révolution nassérienne de 1952, dans une chambre d’hôtel genevoise. C’est à travers la voix de Nuri, le fils de Kamal, que sont restitués les faits, survenus durant son adolescence. L’évocation du père recompose peu à peu la figure du disparu, l’absence faisant de chaque souvenir un indice guidant le narrateur dans sa quête de vérité. La disparition lève ainsi le voile sur un faisceau de non-dits entretenus par l’entourage de Nuri, le goût du secret et l’extrême pudeur faisant loi dans l’ambiance calfeutrée de la haute société du Caire. Récit d’un mystérieux enlèvement, Une disparition raconte en réalité non pas une, mais plusieurs disparitions : la mort inexpliquée de la mère de Nuri, alors âgé de dix ans, signifiant aussi pour le narrateur la fin de la quiétude de l’enfance. Ce dernier découvre par ailleurs l’émoi amoureux en la personne de Mona, la nouvelle femme de son père Kamal, pour qui il nourrit une passion tourmentée par la culpabilité. L’envoi de Nuri dans un pensionnat anglais brise cependant ce triangle amoureux, qui se redessine à nouveau lors de l’enlèvement de Kamal à Genève, le fils et l’épouse se retrouvant tous deux devant le spectre du disparu, travaillés par un sentiment d’impuissance et d’incompréhension. Les mystérieuses circonstances du kidnapping ravivent alors le poids du secret, semant la paranoïa dans l’esprit de personnages évoluant dans une réalité hypersensible, peuplée d’une solitude nostalgique et mélancolique. C’est ici que le roman d’Hisham Matar prend toute sa force : la disparition de l’autre signifie en effet la perte d’une part de soi, l’achèvement d’une réalité au profit d’un monde inconnu au sein duquel le narrateur devra trouver sa place. Les questions de la construction identitaire et de l’héritage se posent alors avec acuité, Nuri étant amené à se construire habité par les résonances troublantes du passé qu’il porte en héritage. Poignant récit initiatique, Une disparition est également une écriture de l’exil et du renoncement, qui fait apparaître une passionnante toile de fond politique. De l’Irak (pays natal de Nuri, dont l’auteur tait volontairement le nom) à l’Égypte, en passant par la France, l’Angleterre et la Suisse, les personnages évoluent dans un monde travaillé par des fractures et des conflits, mais aussi des mélanges culturels. Un arrière-plan qu’Isham Matar suggère avec finesse, avec le même goût pour l’évocation énigmatique que celui qui habite les personnages de son roman.

Une disparition

Denoël - 2012

Une disparition « Il est des jours où l’absence de mon père me pèse comme un enfant assis sur ma poitrine. Il en est d’autres où je me souviens à peine des traits exacts de son visage, jusqu’à devoir sortir de leur vieille enveloppe les photographies rangées dans le tiroir de ma table de nuit. Jamais, depuis sa soudaine et mystérieuse disparition, je n’ai cessé de le chercher, de scruter les endroits les plus improbables. Toute chose, tout être, l’existence elle-même, sont devenus évocations, possibilités d’une ressemblance. Peutêtre est-ce là ce qu’on entend par ce mot bref et aujourd’hui presque archaïque : élégie. » Une disparition se noue autour d’une intrigue politique : l’enlèvement de Kamal Pasha el-Alfi, ancien ministre sous la monarchie égyptienne et dissident politique depuis la révolution nassérienne de 1952, dans une chambre d’hôtel genevoise. C’est à travers la voix de Nuri, le fils de Kamal, que sont restitués les faits, survenus durant son adolescence. L’évocation du père recompose peu à peu la figure du disparu, l’absence faisant de chaque souvenir un indice guidant le narrateur dans sa quête de vérité. La disparition lève ainsi le voile sur un faisceau de non-dits entretenus par l’entourage de Nuri, le goût du secret et l’extrême pudeur faisant loi dans l’ambiance calfeutrée de la haute société du Caire. Récit d’un mystérieux enlèvement, Une disparition raconte en réalité non pas une, mais plusieurs disparitions : la mort inexpliquée de la mère de Nuri, alors âgé de dix ans, signifiant aussi pour le narrateur la fin de la quiétude de l’enfance. Ce dernier découvre par ailleurs l’émoi amoureux en la personne de Mona, la nouvelle femme de son père Kamal, pour qui il nourrit une passion tourmentée par la culpabilité. L’envoi de Nuri dans un pensionnat anglais brise cependant ce triangle amoureux, qui se redessine à nouveau lors de l’enlèvement de Kamal à Genève, le fils et l’épouse se retrouvant tous deux devant le spectre du disparu, travaillés par un sentiment d’impuissance et d’incompréhension. Les mystérieuses circonstances du kidnapping ravivent alors le poids du secret, semant la paranoïa dans l’esprit de personnages évoluant dans une réalité hypersensible, peuplée d’une solitude nostalgique et mélancolique. C’est ici que le roman d’Hisham Matar prend toute sa force : la disparition de l’autre signifie en effet la perte d’une part de soi, l’achèvement d’une réalité au profit d’un monde inconnu au sein duquel le narrateur devra trouver sa place. Les questions de la construction identitaire et de l’héritage se posent alors avec acuité, Nuri étant amené à se construire habité par les résonances troublantes du passé qu’il porte en héritage. Poignant récit initiatique, Une disparition est également une écriture de l’exil et du renoncement, qui fait apparaître une passionnante toile de fond politique. De l’Irak (pays natal de Nuri, dont l’auteur tait volontairement le nom) à l’Égypte, en passant par la France, l’Angleterre et la Suisse, les personnages évoluent dans un monde travaillé par des fractures et des conflits, mais aussi des mélanges culturels. Un arrière-plan qu’Isham Matar suggère avec finesse, avec le même goût pour l’évocation énigmatique que celui qui habite les personnages de son roman.

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