L’âme Russe, Philippe Rey 2009 Ce que l’on éprouve en Russie au milieu des interminables forêts, steppes, tourbières, champs de neige, étendues d’eau glacées, incite à se demander quel mystère se cache derrière ces espaces démesurés. Cette « âme russe », Olivier Martel en a saisi, dans ses belles photographies, les manifestations visibles. Certaines nous la montrent à l’œuvre à l’intérieur des églises, dans la splendeur des costumes et la somptuosité de la liturgie. Mais elle se manifeste aussi chez les paysans qui causent au-dessus d’une palissade, les enfants qui pêchent au bout d’une jetée de planches, le balayeur qui joue avec son chien, et même chez le cheval attelé au traîneau, le tramway brinqueballant dans la brume, le tracteur au travail dans la neige… Les textes de Dominique Fernandez complètent cette exploration du monde russe. Si les coutumes, croyances et autres faits divers apportent des éléments de compréhension, les artistes – Tolstoï, Tchekhov, Tarkovski… – l’incarnent véritablement car « ils expriment le sentiment de tout le monde, dans le langage de tout le monde, de manière à être compris, aimés de tous ». C’est bien par son « âme » que la Russie continue à se distinguer de toutes les autres nations et à séduire, à intriguer, à fasciner. Avec Tolstoï, Grasset 2010 Universellement célèbre, Tolstoï reste en même temps assez méconnu, dans la mesure où l’on a réduit son oeuvre à quelques personnages ’romantiques’ : Natacha, le prince André, Anna Karénine, et ses innombrables thèmes à la seule passion amoureuse. Dominique Fernandez a relu ses livres et découvert un écrivain de combat, un des premiers qui aient dénoncé les horreurs de la guerre (et en particulier de la guerre de Tchétchénie, déjà injuste et cruelle en 1850), critiqué le système judiciaire, carcéral, les scandales de l’injustice sociale, les abus du pouvoir étatique, les impostures de l’Eglise, etc. En face de son contemporain Dostoïevski, porté au paroxysme et à l’outrance, il garde toujours un ton juste et mesuré. Son style porte l’empreinte d’une perfection intemporelle.