Ces semaines tragiques de janvier auront révélé ce que nous savions depuis longtemps, les fractures qui travaillent la société française, l’effritement du lien social, la réalité de groupes humains qui s’observent, se méfient les uns des autres, ne s’aiment plus, mais, moins attendu peut-être, elles auront aussi apporté une réponse venue des profondeurs du pays : cette France qui envahissait tout l’espace, n’en finissait pas de déborder en un élan irrépressible, elle était « une » dans sa multiplicité assumée, de cultures et de croyances, une et plurielle, mais bien loin de tout « communautarisme » – et c’est tout à la fois de ces fractures et de cette réponse du 11 janvier qu’il faut partir si nous voulons reconstruire un « être ensemble ». Sur ce point, historiens, écrivains et artistes ont des choses à dire...
D’abord, que la République pure et dure représentée par David dans son Serment des Horaces où ceux-ci naissent « hommes nouveaux » dans un espace public régi par la seule citoyenneté (le serment), en rejetant sur la droite du tableau tout le « reste » symbolisé par les femmes en pleurs, n’a jamais existé. Ensuite que c’est ce « reste » refoulé qui aujourd’hui fait retour dans l’espace public. Enfin, que nos récits collectifs, nos fictions, bref la culture, sont néces- saires, aussi, à la création de « l’être ensemble ».
L’invention de la France